La grammaire locale du conditionnel
11 décembre 2025 · 14h00 – 16h00
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Bien que les travaux sur le conditionnel français (désormais COND) en synchronie et en diachronie se soient multipliés depuis les années 1990, les phénomènes collocationnels attachés à son usage n’ont été que ponctuellement étudié. Le but de l’exposé est de mieux comprendre la dimension phraséologique du fonctionnement du COND en considérant le phénomène dans sa globalité, ce que nous désignons par le terme de « grammaire locale ». Cette notion renvoie aux emplois dans lesquels s’exercent des contraintes contextuelles fortes — morphosyntaxiques et, le cas échéant, lexicales — et où le COND ne semble finalement constituer qu’une brique d’une structure figée plus large :
Ex. On dirait qu’il va pleuvoir. [on dirait x]
Ça vous dirait d’aller au cinéma ? [ça P2 dire-PRS/COND X ?]
Selon notre hypothèse, cette grammaire locale est la manifestation de réseaux de « constructions », au sens des Grammaire des constructions (Goldberg 1995, 2006), qui ont émergé dans et travers l’usage de la langue. Pour étudier cette grammaire locale, nous adoptons une perspective diachronique et fondée sur l’usage combinant approches quantitative et qualitative. Dans une première étude « guidée par les corpus » (Tognini-Bonnelli 2001) nous exploitons le corpus de la GGHF (Grande Grammaire Historique du français) pour étudier les collocations verbales du conditionnel dans le temps. Le but est de retracer l’évolution du poids de ces collocations à partir de différentes mesures (fréquences, diversité) et d’isoler les collocations privilégiées susceptibles de constituer des constructions (calcul de spécificités). Dans une deuxième série d’études « fondées sur les corpus » (ibidem), on s’intéresse à deux collocations particulières, on dirait x et à partir du corpus frantext et s’appuyant sur l’annotation linguistique de données. L’analyse permet de démontrer le statut constructionnel de [on dirait x] à valeur de semblance et d’en retracer la constructionnalisation en diachronie. Les résultats préliminaires de la seconde étude sur aurait dû + INF suggèrent l’émergence de deux constructions modales sémantiquement mixte signifiant le reproche et le regret.
