Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
BAU_1/BAU98
Charles BAUDELAIRE
LES FLEURS DU MAL
1857-1861
TABLEAUX PARISIENS
XCIV
Les Petites Vieilles
À Victor Hugo
I
Dans les plis sinueuxdes vieilles capitales, 6+6 a
tout, même l’horreur,tourne aux enchantements, 6+6 b
Je guette, obéissantà mes humeurs fatales, 6+6 a
Des êtres singuliers,décrépits et charmants. 6+6 b
5 Ces monstres disloquésfurent jadis des femmes, 6+6 a
Éponine ou Laïs !— Monstres brisés, bossus 6+6 b
Ou tordus, aimons-les !ce sont encor des âmes. 6+6 a
Sous des jupons trouéset sous de froids tissus 6+6 b
Ils rampent, flagelléspar les bises iniques, 6+6 a
10 Frémissant au fracasroulant des omnibus, 6+6 b
Et serrant sur leur flanc,ainsi que des reliques, 6+6 a
Un petit sac brodéde fleurs ou de rébus ; 6+6 b
Ils trottent, tout pareilsà des marionnettes ; 6+6 a
Se trnent, comme fontles animaux blessés, 6+6 b
15 Ou dansent, sans vouloirdanser, pauvres sonnettes 6+6 a
se pend un Démonsans pitié ! Tout cassés 6+6 b
Qu’ils sont, ils ont des yeuxpeants comme une vrille, 6+6 a
Luisants comme ces trous l’eau dort dans la nuit ; 6+6 b
Ils ont les yeux divinsde la petite fille 6+6 a
20 Qui s’étonne et qui rità tout ce qui reluit. 6+6 b
Avez-vous observéque maints cercueils de vieilles 6+6 a
Sont presque aussi petitsque celui d’un enfant ? 6+6 b
La Mort savante metdans ces bières pareilles 6+6 a
Un symbole d’un gtbizarre et captivant, 6+6 b
25 Et lorsque j’entrevoisun fantôme débile 6+6 a
Traversant de Parisle fourmillant tableau, 6+6 b
Il me semble toujoursque cet être fragile 6+6 a
S’en va tout doucementvers un nouveau berceau ; 6+6 b
À moins que, méditantsur la géométrie, 6+6 a
30 Je ne cherche, à l’aspectde ces membres discords, 6+6 b
Combien de fois il fautque l’ouvrier varie 6+6 a
La forme de la bte l’on met tous ces corps. 6+6 b
— Ces yeux sont des puits faitsd’un million de larmes, 6+6 a
Des creusets qu’un métalrefroidi pailleta 6+6 b
35 Ces yeux mystérieuxont d’invincibles charmes 6+6 a
Pour celui que l’austèreInfortune allaita ! 6+6 b
II
De Frascati défuntVestale enamourée ; 6+6 a
Prêtresse de Thalie,hélas ! dont le souffleur 6+6 b
Défunt, seul, sait le nom ;célèbre évaporée 6+6 a
40 Que Tivoli jadisombragea dans sa fleur, 6+6 b
Toutes m’enivrent ! maisparmi ces êtres frêles 6+6 a
Il en est qui, faisantde la douleur un miel, 6+6 b
Ont dit au Dévouementqui leur prêtait ses ailes : 6+6 a
« Hippogriffe puissant,mène-moi jusqu’au ciel ! » 6+6 b
45 L’une, par sa patrieau malheur exercée, 6+6 a
L’autre, que son épouxsurchargea de douleurs, 6+6 b
L’autre, par son enfantMadone transpercée, 6+6 a
Toutes auraient pu faireun fleuve avec leurs pleurs ! 6+6 b
III
Ah ! que j’en ai suivi,de ces petites vieilles ! 6+6 a
50 Une, entre autres, à l’heure le soleil tombant 6+6 b
Ensanglante le cielde blessures vermeilles, 6+6 a
Pensive, s’asseyaità l’écart sur un banc, 6+6 b
Pour entendre un de cesconcerts, riches de cuivre, 6−6 a
Dont les soldats parfoisinondent nos jardins, 6+6 b
55 Et qui, dans ces soirs d’or l’on se sent revivre, 6+6 a
Versent quelque héroïsmeau cœur des citadins. 6+6 b
Celle-là droite encor,fière et sentant la règle, 6+6 a
Humait avidementce chant vif et guerrier ; 6+6 b
Son œil parfois s’ouvraitcomme l’œil d’un vieil aigle ; 6+6 a
60 Son front de marbre avaitl’air fait pour le laurier ! 6+6 b
IV
Telles vous cheminez,stoïques et sans plaintes, 6+6 a
À travers le chaosdes vivantes cités, 6+6 b
Mères au cœur saignant,courtisanes ou saintes, 6+6 a
Dont autrefois les nomspar tous étaient cités. 6+6 b
65 Vous qui fûtes la grâceou qui fûtes la gloire, 6+6 a
Nul ne vous reconnt !un ivrogne incivil 6+6 b
Vous insulte en passantd’un amour dérisoire ; 6+6 a
Sur vos talons gambadeun enfant lâche et vil. 6+6 b
Honteuses d’exister,ombres ratatinées, 6+6 a
70 Peureuses, le dos bas,vous côtoyez les murs ; 6+6 b
Et nul ne vous salue,étranges destinées ! 6+6 a
Débris d’humanitépour l’éternité mûrs ! 6+6 b
Mais moi, moi qui de lointendrement vous surveille, 6+6 a
L’œil inquiet, fixésur vos pas incertains, 6+6 b
75 Tout comme si j’étaisvotre père, ô merveille ! 6+6 a
Je gte à votre insudes plaisirs clandestins : 6+6 b
Je vois s’épanouirvos passions novices ; 6+6 a
Sombres ou lumineux,je vis vos jours perdus ; 6+6 b
Mon cœur multipliéjouit de tous vos vices ! 6+6 a
80 Mon âme resplenditde toutes vos vertus ! 6+6 b
Ruines ! ma famille !ô cerveaux congénères ! 6+6 a
Je vous fais chaque soirun solennel adieu ! 6+6 b
serez-vous demain,Èves octogénaires, 6+6 a
Sur qui pèse la griffeeffroyable de Dieu ? 6+6 b
mètre profil métrique : 6−6
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