Métrique en Ligne
BAU_1/BAU110
Charles BAUDELAIRE
LES FLEURS DU MAL
1857-1861
TABLEAUX PARISIENS
CVI
Le Crépuscule du matin
La diane chantait dans les cours des casernes, 6+6 a
Et le vent du matin soufflait sur les lanternes. 6+6 a
C’était l’heure où l’essaim des rêves malfaisants 6+6 b
Tord sur leurs oreillers les bruns adolescents ; 6+6 b
5 Où, comme un œil sanglant qui palpite et qui bouge, 6+6 a
La lampe sur le jour fait une tache rouge ; 6+6 a
Où l’âme, sous le poids du corps revêche et lourd, 6+6 b
Imite les combats de la lampe et du jour. 6+6 b
Comme un visage en pleurs que les brises essuient, 6+6 a
10 L’air est plein du frisson des choses qui s’enfuient, 6+6 a
Et l’homme est las d’écrire et la femme d’aimer. 6+6 b
Les maisons çà et là commençaient à fumer. 6+6 b
Les femmes de plaisir, la paupière livide, 6+6 a
Bouche ouverte, dormaient de leur sommeil stupide ; 6+6 a
15 Les pauvresses, traînant leurs seins maigres et froids, 6+6 b
Soufflaient sur leurs tisons et soufflaient sur leurs doigts. 6+6 b
C’était l’heure où parmi le froid et la lésine 6+6 a
S’aggravent les douleurs des femmes en gésine ; 6+6 a
Comme un sanglot coupé par un sang écumeux 6+6 b
20 Le chant du coq au loin déchirait l’air brumeux ; 6+6 b
Une mer de brouillards baignait les édifices, 6+6 a
Et les agonisants dans le fond des hospices 6+6 a
Poussaient leur dernier râle en hoquets inégaux. 6+6 b
Les débauchés rentraient, brisés par leurs travaux. 6+6 b
25 L’aurore grelottante en robe rose et verte 6+6 a
S’avançait lentement sur la Seine déserte, 6+6 a
Et le sombre Paris, en se frottant les yeux, 6+6 b
Empoignait ses outils, vieillard laborieux. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
forme globale type : suite de distiques
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