Métrique en Ligne
VOL_4/VOL64
VOLTAIRE
(François-Marie Arouet)
LES ÉPÎTRES
1706-1778
ÉPÎTRE XII
1716
À MADAME DE G ***
Quel triomphe accablant, quelle indigne victoire 12
Cherchez-vous tristement à remporter sur vous ? 12
Votre esprit éclairé pourra-t-il jamais croire 12
D'un double testament la chimérique histoire, 12
5 Et les songes sacrés de ces mystiques fous, 12
Qui, dévots fainéants et pieux loups-garous, 12
Quittent de vrais plaisirs pour une fausse gloire ? 12
Le plaisir est l'objet, le devoir et le but 12
De tous les êtres raisonnables ; 8
10 L'amour est fait pour vos semblables ; 8
Les bégueules font leur salut. 8
Que sur la volupté tout votre espoir se fonde ; 12
N'écoutez désormais que vos vrais sentiments : 12
Songez qu'il était des amants 8
15 Avant qu'il fût des chrétiens dans le monde. 10
Vous m'avez donc quitté pour votre directeur. 12
Ah ! Plus que moi cent fois Couët est séducteur. 12
Je vous abusai moins ; il est le seul coupable : 12
Chloé, s'il vous faut une erreur, 8
20 Choisissez une erreur aimable. 8
Non, n'abandonnez point des cœurs où vous régnez. 12
D'un triste préjugé victime déplorable, 12
Vous croyez servir Dieu ; mais vous servez le diable, 12
Et c'est lui seul que vous craignez. 8
25 La superstition, fille de la faiblesse, 12
Mère des vains remords, mère de la tristesse, 12
En vain veut de son souffle infecter vos beaux jours ; 12
Allez, s'il est un Dieu, sa tranquille puissance 12
Ne s'abaissera point à troubler nos amours : 12
30 Vos baisers pourraient-ils déplaire à sa clémence ? 12
La loi de la nature est sa première loi ; 12
Elle seule autrefois conduisit nos ancêtres ; 12
Elle parle plus haut que la voix de vos prêtres, 12
Pour vous, pour vos plaisirs, pour l'amour, et pour moi. 12
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