Métrique en Ligne
VOL_4/VOL56
VOLTAIRE
(François-Marie Arouet)
LES ÉPÎTRES
1706-1778
ÉPÎTRE IV
1714
A MADAME DE MONTBRUN-VILLEFRANCHE
Montbrun, par l'amour adoptée, 8
Digne du cœur d'un demi-dieu, 8
Et, pour dire encor plus, digne d'être chantée 12
Ou par Ferrand, ou par Chaulieu ; 8
5 Minerve et l'enfant de Cythère 8
Vous ornent à l'envi d'un charme séducteur ; 12
Je vois briller en vous l'esprit de votre mère 12
Et la beauté de votre sœur : 8
C'est beaucoup pour une mortelle. 8
10 Je n'en dirai pas plus : songez bien seulement 12
À vivre, s'il se peut, heureuse autant que belle ; 12
Libre des préjugés que la raison dément, 12
Aux plaisirs où le monde en foule vous appelle 12
Abandonnez-vous prudemment. 8
15 Vous aurez des amants, vous aimerez sans doute : 12
Je vous verrai, soumise à la commune loi, 12
Des beautés de la cour suivre l'aimable route, 12
Donner, reprendre votre foi. 8
Pour moi, je vous louerai ; ce sera mon emploi. 12
20 Je sais que c'est souvent un partage stérile, 12
Et que La Fontaine et Virgile 8
Recueillaient rarement le fruit de leurs chansons. 12
D'un inutile dieu malheureux nourrissons, 12
Nous semons pour autrui. J'ose bien vous le dire, 12
25 Mon cœur de La Duclos fut quelque temps charmé ; 12
L'amour en sa faveur avait monté ma lyre : 12
Je chantais La Duclos ; D'Uzès en fut aimé : 12
C'était bien la peine d'écrire ! 8
Je vous louerai pourtant ; il me sera trop doux 12
30 De vous chanter, et même sans vous plaire ; 10
Mes chansons seront mon salaire : 8
N'est-ce rien de parler de vous ? 8
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