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VOL_1/VOL12
VOLTAIRE
(François-Marie Arouet)
Odes
Tragédie en trois actes
1709-1775
XII
A LA REINE DE HONGRIE
MARIE-THÉRÈSE D'AUTRICHE
Fille de ces héros que l'Empire eut pour maîtres, 12
Digne du trône auguste où l'on vit tes ancêtres, 12
Toujours près de leur chute et toujours affermis ; 12
Princesse magnanime, 6
5 Qui jouis de l'estime 6
De tous tes ennemis : 6
Le Français généreux, si fier et si traitable, 12
Dont le goût pour la gloire est le seul goût durable, 12
Et qui vole en aveugle où l'honneur le conduit, 12
10 Inonde ton empire, 6
Te combat et t'admire, 6
T'adore et te poursuit. 6
Par des nœuds étonnants l'altière Germanie, 12
A l'empire français malgré soi réunie, 12
15 Fait de l'Europe entière un objet de pitié ; 12
Et leur longue querelle 6
Fut cent fois moins cruelle 6
Que leur triste amitié. 6
Ainsi de l'équateur et des antres de l'Ourse 12
20 Les vents impétueux emportent dans leur course 12
Des nuages épais l'un à l'autre opposés ; 12
Et, tandis qu'ils s'unissent, 6
Les foudres retentissent 6
De leurs flancs embrasés. 6
25 Quoi ! des rois bienfaisants ordonnent ces ravages ! 12
Ils annoncent le calme, ils forment les orages ! 12
Ils prétendent conduire à la félicité 12
Les nations tremblantes, 6
Par les routes sanglantes 6
30 De la calamité ! 6
O vieillard vénérable, à qui les destinées 12
Ont de l'heureux Nestor accordé les années, 12
Sage que rien n'alarme et que rien n'éblouit, 12
Veux-tu priver le monde 6
35 De cette paix profonde 6
Dont ton âme jouit ? 6
Ah ! s'il pouvait encore, au gré de sa prudence, 12
Tenant également le glaive et la balance, 12
Fermer, par des ressorts aux mortels inconnus, 12
40 De sa main respectée, 6
La porte ensanglantée 6
Du temple de Janus ! 6
Si de l'or des Français les sources égarées, 12
Ne fertilisant plus de lointaines contrées, 12
45 Rapportaient l'abondance au sein de nos remparts, 12
Embellissaient nos villes, 6
Arrosaient les asiles 6
Où languissent les arts ! 6
Beaux-Arts, enfants du Ciel, de la Paix et des Grâces, 12
50 Que Louis en triomphe amena sur ses traces, 12
Ranimez vos travaux, si brillants autrefois, 12
Vos mains découragées, 6
Vos lyres négligées, 6
Et vos tremblantes voix. 6
55 De l'immortalité vos succès sont le gage. 12
Tous ces traités rompus et suivis du carnage, 12
Ces triomphes d'un jour, si vains, si célébrés, 12
Tout passe, et tout retombe 6
Dans la nuit de la tombe ; 6
60 Et vous seuls demeurez. 6
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