VERS LESBOS |
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Tu viendras, les yeux pleins du soir et de l’hier… |
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Et ce sera par un beau couchant sur la mer. |
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Frêle comme un berceau posé sur les flots lisses, |
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Notre barques sera pleine d’ambre et d’épices. |
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Les vents s’inclineront, soumis à mon vouloir. |
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Je te dirai : « La mer nous appartient, ce soir. » |
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Tes doigts ressembleront aux longs doigts des noyées. |
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Nous irons au hasard, les voiles déployées. |
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Levant tes yeux surpris, tu me demanderas : |
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« Dans quel lit inconnu dormirai-je en tes bras ? » |
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Des oiseaux chanteront, cachés parmi les voiles. |
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Nous verrons se lever les premières étoiles. |
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Tu me diras : « Les flots se courbent sous ma main… |
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Et quel est ce pays où nous vivrons demain ? » |
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Mais je te répondrai : « L’onde nocturne est blême, |
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Et nous sommes encor loin de l’île que j’aime. |
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« Ferme tes yeux lassés par le voyage et dors |
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Comme en ta chambre close aux rumeurs du dehors… |
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« Telle, dans un verger, une femme qui chante, |
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Le bonheur nous attend dans cette île odorante. |
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« Couvre ta face pâle avec tes cheveux roux. |
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L’heure est calme et la paix de la mer est sur nous. |
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« Ne t’inquiète point… Je suis accoutumée |
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Aux risques de la mer et des vents, Bien-Aimée… » |
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Sous la protection du croissant argentin, |
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Tu dormiras jusqu’à l’approche du matin. |
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Les plages traceront au loin la grise marge |
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De leurs sables… Tes yeux s’ouvriront sur le large. |
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Tu m’interrogeras, non sans un peu d’effroi. |
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Des chants mystérieux parviendront jusqu’à toi… |
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Tu me diras, avec des rougeurs ingénues : |
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« Rien n’est aussi troublant que ces voix inconnues. |
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« Leur souffle harmonieux évente mon front las : |
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Mais l’aube est sombre encore et je ne comprend pas. |
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« Notre mauvais destin saura-t-il nous rejoindre |
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Au fond de ce matin craintif que je vois poindre ? » |
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Je te dirai, fermant tes lèvres d’un baiser : |
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« Le bonheur est là-bas… Car il faut tout oser… |
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« Là-bas, nous entendrons la suprême musique… |
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Et, vois, nous abordons à l’île chimérique… » |
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