Métrique en Ligne
VIV_5/VIV196
Renée VIVIEN
À l'heure des mains jointes
1906
BONHEUR CRÉPUSCULAIRE
Tes sombres anneaux d’améthyste 8
S’animent et tremblent un peu 8
Sous la jaune lueur du feu… 8
Au dehors la clarté persiste. 8
5 Accueillons le songe, donneur 8
D’enchantements et de féeries… 8
Mêlons nos âmes attendries 8
Et parlons de notre bonheur. 8
Parlons du bonheur, ma très chère. 8
10 Comme Ton parle d’un ami, 8
Évoquant, en l’âtre endormi. 8
Sa ressemblance familière… 8
Les choses semblent nous servir 8
Dans un empressement docile… 8
15 Chuchotons : « Mon âme tranquille 8
N’a plus de rêves d’avenir. » 8
Le bonheur se fait mieux comprendre 8
Par les intimités d’hiver. 8
Lorsque flotte et pleure dans l’air 8
20 L’âme du crépuscule tendre. 8
Le bonheur est tissé d’oubli ; 8
Il ne connaît pas l’espérance ; 8
Il ressemble à la délivrance 8
Après le labeur accompli. 8
25 Et c’est le bonheur d’être assises 8
Toutes deux, auprès du foyer, 8
Et de voir le feu rougeoyer 8
En tes calmes prunelles grises. 8
C’est de taire les vains aveux 8
30 Et d’oublier les autres femmes, 8
En regardant luire les flammes 8
À travers tes profonds cheveux. 8
C’est de voir s’embraser l’automne 8
Dans l’âtre aux multiples reflets 8
35 Où croulent des tours, des palais, 8
Des façades et des colonnes… 8
Dans mon cœur qui frissonne un peu, 8
Un sanglot d’autrefois persiste… 8
Vois comme le bonheur est triste, 8
40 Les soirs d’hiver, auprès du feu… 8
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