Métrique en Ligne
VIV_3/VIV84
Renée VIVIEN
Évocations
1903
LES CHARDONS
Ne dissimule pas ton sourire qui tremble, 12
Lève sur moi tes yeux sans trouble et sans regret, 12
Et nous irons cueillir la fleur qui te ressemble, 12
Dans le champ nébuleux qui longe la forêt, 12
5 Les mystiques chardons dédaignés du profane. 12
Je préfère aux langueurs ta rigide beauté. 12
Car l’Épouse souillée aux yeux de courtisane 12
Ne doit plus asservir mon être tourmenté. 12
Viens, très blanche à travers la brume diaphane, 12
10 Droite dans la raideur de ta virginité. 12
Tu ne seras jamais la fiévreuse captive 12
Qu’enchaîne le baiser, qu’emprisonne le lit, 12
Tu ne seras jamais la compagne lascive 12
Dont la chair se consume et dont le front pâlit. 12
15 — Garde ton blanc parfum qui dédaigne le faste. 12
Tu ne connaîtras point les lâches abandons, 12
Les sanglots partagés qui font l’âme plus vaste, 12
Le doute et la faiblesse ardente des pardons… 12
Et, puisque c’est ainsi que je t’aime, ô Très Chaste ! 12
20 Nous cueillerons ce soir les mystiques chardons. 12
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