Métrique en Ligne
VIV_3/VIV70
Renée VIVIEN
Évocations
1903
LA MORT D’UNE BACCHANTE
Nous ne tisserons pas les graves violettes… 12
Nous ferons retentir le paktis vaste et doux 12
À travers les forêts et les plaines muettes, 12
Et nous arracherons le feuillage aux tons roux… 12
5 — Ô compagnes, la voix large des lyres chante 12
La mort d’une Bacchante. 6
La solitude a moins de regrets que l’Amour 12
Et le sanglot est moins déchirant que le rire… 12
Nous mêlerons nos bras jusqu’au déclin du jour, 12
10 Et nous parfumerons de roses et de myrrhe 12
Nos corps, où brûlera, comme un souffle divin, 12
L’âme ardente du vin. 6
Contemple sur ton seuil de pierre, ô sombre proie 12
De l’Hadès et du Styx, ô Silence, ô Pâleur, 12
15 Notre douleur, pareille aux éclats de la joie, 12
Notre joie aux yeux fous, pareille à la douleur. 12
Car la foule, cueillant la fleur des vignes, chante 12
La mort d’une Bacchante. 6
Nous t’envelopperons de lumière et de bruit. 12
20 Plus tard, nous couperons nos cheveux de prêtresses, 12
Dorés comme la lune, épais comme la nuit, 12
Pourpres comme le soir, imprégnés de caresses ; 12
Plus tard, nous éteindrons la lueur du flambeau 12
Sur ton calme tombeau. 6
25 Et nous te laisserons à l’Ombre pacifique… 12
Jadis ta lassitude envia le sommeil 12
Du Faune et du Satyre accablés de musique, 12
Rassasiés de fruits et repus de soleil. 12
— Compagnes, écoutez la pleureuse qui chante 12
30 La mort d’une Bacchante. 6
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