Métrique en Ligne
VIV_2/VIV46
Renée VIVIEN
Cendres et Poussières
1902
PROPHÉTIE
Tes cheveux aux blonds verts s’imprègnent d’émeraude 12
Sous le ciel pareil aux feuillages clairs. 10
L’odeur des pavots se répand et rôde 10
Ainsi qu’un soupir mourant dans les airs. 10
5 Les yeux attachés sur ton fin sourire, 10
J’admire son art et sa cruauté, 10
Mais la vision des ans me déchire, 10
Et, prophétiquement, je pleure ta beauté ! 12
Puisque telle est la loi lamentable et stupide, 12
10 Tu te flétriras un jour, ah ! mon Lys ! 10
Et le déshonneur hideux de la ride 10
Marquera ton front de ce mot : Jadis ! 10
Tes pas oublieront le rythme de l’onde, 10
Ta chair sans désir, tes membres perclus 10
15 Ne frémiront plus dans l’ardeur profonde : 10
L’amour désenchanté ne te connaîtra plus ! 12
Ton sein ne battra plus comme l’essor de l’aile 12
Sous l’oppression du cœur généreux, 10
Et tu fuiras l’heure étrange et cruelle 10
20 Où l’ombre pâlit le front des heureux. 10
Ton sommeil craindra l’aurore où persiste 10
Le dernier rayon des derniers flambeaux : 10
Ton âme de vierge amoureuse et triste 10
S’éteindra dans tes yeux plus froids que les tombeaux. 12
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