Métrique en Ligne
VHR_3/VHR113
Émile VERHAEREN
LES SOIRS
1887
LES DÉBÂCLES
1888
DÉFORMATION MORALE
INCONSCIENCE
L’âme et le cœur si las des jours, si las des voix, 12
Si las de rien, si las de tout, l’âme salie ; 12
Quand je suis seul, le soir, soudainement, parfois, 12
Je sens pleurer sur moi l’œil blanc de la folie. 12
5 Celui, si triste hélas ! qui s’en alla, là-bas, 12
— Pâle œil désenchanté de la raison méchante — 12
Rêver à quelque chose, au loin, qu’on ne voit pas 12
À quelque chose au loin qui tremble et pleure et chante. 12
Morne crapaud blotti sous les roses, tout seul ! 12
10 Si seul ! — morne crapaud pleureur de lune, appelle ! 12
Appelle ! Et vous, petites fleurs, pour le linceuil 12
De mon cerveau, l’ensevelisseuse vient-elle ? 12
Être l’errant au monde et le pauvre de soi, 12
Avec le feu bougeant d’une âme, qui tremblotte 12
15 Derrière une main frêle et ballotte son moi ; 12
Qui tremblotte comme un reflet dans l’eau ballotte. 12
Passer inconscient et se faire l’ami 12
De ce qui vole et rampe et fuit, là-bas. Naguère, 12
Avant que ne sortît du somme, l’endormi, 12
20 Le premier homme, on a vu mes pareils sur terre. 12
Ayez amour pour eux, ayez amour un peu ! 12
Ils sont les charmeurs lents, là-bas, des brises lentes : 12
Leurs doigts, qui n’ont jamais touché le mauvais feu, 12
Dansent des airs lointains, sur des flûtes tremblantes : 12
25 Les puérils et les vaguants, mais loin du mal, 12
Et les doux égarés, par les bruyères vertes : 12
Hamlet rirait peut être, hélas ! mais Parsifal ? 12
Ô Parsifal bénin et clair, comprendrait certes ! 12
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