Métrique en Ligne
VER_9/VER376
Paul VERLAINE
PARALLÈLEMENT
1889
BALLADE SAPPHO
MA douce main de maîtresse et d’amant 10
Passe et rit sur ta chère chair en fête, 10
Rit et jouit de ton jouissement. 10
Pour la servir tu sais bien qu’elle est, faite, 10
5 Et ton beau corps faut que je le dévête 10
Pour l’enivrer sans fin d’un art nouveau 10
Toujours, dans la caresse toujours prète. 10
Je suis pareil à la grande Sappho. 10
Laisse ma tête errant et s’abîmant 10
10 A l’aventure, un peu farouche, en quête 10
D’ombre et d’odeur et d’un travail charmant 10
Vers les saveurs de ta gloire secrète. 10
Laisse rôder l’âme de ton poète 10
Partout par là, champ ou bois, mont ou vau, 10
15 Comme tu veux et si je le souhaite. 10
Je suis pareil à la grande Sappho. 10
Je presse alors tout ton corps goulûment, 10
Toute ta chair contre mon corps d’athlète 10
Qui se bande et s’amollit par moment, 10
20 Heureux du triomphe et de la défaite 10
En ce conflit du cœur et de la tête. 10
Pour la stérile étreinte où le cerveau 10
Vient faire enfin la nature complète, 10
Je suis pareil à la grande Sappho. 10
ENVOI
25 Prince ou princesse, honnête ou malhonnête, 10
Qui qu’en grogne, quel que soit son niveau, 10
Trop su poète ou divin proxénète, 10
Je suis pareil à la grande Sappho. 10
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