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VER_9/VER343
Paul VERLAINE
PARALLÈLEMENT
1889
FILLES
IV
AUBRUN
« Et des châtain’s aussi. »
(Chanson de Malbrouk.)
TES yeux, tes cheveux indécis, 8
L’arc mal précis de tes sourcils, 8
La fleur pâlotte de ta bouche, 8
Ton corps vague et pourtant dodu, 8
5 Te donnent un air peu farouche 8
A qui tout mon hommage est dû. 8
Mon hommage, eh, parbleu ! tu l’as. 8
Tous les soirs, quels joie et soulas, 8
O ma très sortable châtaine, 8
10 Quand vers mon lit tu viens, les seins 8
Roides, et quelque peu hautaine, 8
Sûre de mes humbles desseins, 8
Les seins roides sous la chemise, 8
Fière de la fête promise 8
15 A tes sens partout et longtemps, 8
Heureuse de savoir ma lèvre, 8
Ma main, mon tout, impénitents 8
De ces péchés qu’un fol s’en sèvre ! 8
Sûre de baisers savoureux 8
20 Dans le coin des yeux, dans le creux 8
Des bras et sur le bout des mammes, 8
Sûre de l’agenouillement 8
Vers ce buisson ardent des femmes 8
Follement, fanatiquement ! 8
25 Et hautaine puisque tu sais 8
Que ma chaire adore à l’excès 8
Ta chair et que tel est ce culte 8
Qu’après chaque mort, – quelle mort ! 8
Elle renaît, dans quel tumulte ! 8
30 Pour mourir encore et plus fort. 8
Oui, ma vague, sois orgueilleuse 8
Car radieuse ou sourcilleuse, 8
Je suis ton vaincu, tu m’as tien : 8
Tu me roules comme la vague 8
35 Dans un délice bien païen, 8
Et tu n’es pas déjà si vague ! 8
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