Métrique en Ligne
VER_7/VER312
Paul VERLAINE
AMOUR
1888
LUCIEN LÉTINOIS
VIII
O l’odieuse obscurité 8
Du jour le plus gai de l’année 8
Dans la monstrueuse cité 8
Où se fit notre destinée ! 8
5 Au lieu du bonheur attendu, 8
Quel deuil profond, quelles ténèbres ! 8
J’en étais comme un mort, et tu 8
Flottais en des pensers funèbres. 8
La nuit croissait avec le jour 8
10 Sur notre vitre et sur notre âme, 8
Tel un pur, un sublime amour 8
Qu’eût étreint la luxure infâme ; 8
Et l’affreux brouillard refluait 8
Jusqu’en la chambre où la bougie 8
15 Semblait un reproche muet 8
Pour quelque lendemain d’orgie, 8
Un remords de péché mortel 8
Serrait notre cœur solitaire… 8
Puis notre désespoir fut tel 8
20 Que nous oubliâmes la terre, 8
Et que pensant au seul Jésus 8
Né rien que pour nous ce jour même, 8
Notre foi prenant le dessus 8
Nous éclaira du jour suprême, 8
25 – Bonne tristesse qu’aima Dieu ! 8
Brume dont se voilait la Grâce, 8
Crainte que l’éclat de son feu 8
Ne fatiguât notre âme lasse. 8
Délicates attentions 8
30 D’une Providence attendrie !… 8
O parfois encore soyons 8
Ainsi tristes, âme chérie ! 8
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