Métrique en Ligne
VER_28/VER843
Paul VERLAINE
POÈMES DIVERS
1890-1895
TRISTIA
Je n’avais pas connu l’Ennui, 8
Pourtant jusqu’au jour d’aujourd’hui 8
Je vivais et mourais de lui. 8
Ce depuis l’atroce journée 8
5 Où, pauvre âme au ciel ramenée, 8
J’ai méconnu ma destinée. 8
Ramenée au ciel, et comment ? 8
Par le fait logique et charmant 8
D’un grand miracle assurément, 8
10 Par la conversion soudaine 8
D’un cœur voué tout à la haine 8
En un d’une onction sereine. 8
Puis m’investit un désir fou 8
À la fois furieux et mou 8
15 Qui m’allait entraînant jusqu’où ? 8
Adieu, l’émoi pur et candide 8
Vers l’idéal sûr et splendide, 8
Pour quel souci bas et sordide ? 8
Adieu les belles oraisons, 8
20 La rosée autour des toisons, 8
La prière aux ardents buissons ! 8
Des querelles sans fin ni trêve, 8
Toujours quelque violent rêve, 8
Une vie à se dire : Crève ! 8
25 Par degrés cet enfer pourtant 8
S’alanguissait, non pénitent, 8
Hélas ! en limbes fades tant ! 8
Rien désormais qui ne soit vague, 8
Ne déraisonne et ne divague… 8
30 Évêque ayant perdu sa bague, 8
Magicien sans talismans, 8
Pôle privé de ses aimants, 8
Tel, moi, monde aux morts éléments ! 8
Ô le remède, le remède ! 8
35 Pauvre âme folle, souviens-toi : 8
Jésus terrible et doux, à l’aide, 8
Seigneur, pour encore la Foi ! 8
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