Métrique en Ligne
SSA_1/SSA8
Camille SAINT-SAËNS
RIMES FAMILIÈRES
1890
STROPHES
LE CHÊNE
À M. Edmond Cottinet.
Le chêne a-t-il grandi ? tient-il bien sa promesse, 12
Ami des anciens jours ? 6
Et ce que tu disais de lui dans sa jeunesse, 12
Le penses-tu toujours ? 6
5 Oui, c’était bien un chêne, et d’une fleur de serre 12
Il n’a pas l’agrément ; 6
Son écorce est rugueuse et sombre : en pleine terre 12
Il a crû lentement. 6
Sa racine a senti bien souvent de la roche 12
10 Le contact détesté ; 6
Mais elle la contourne et sur elle s’accroche 12
Avec ténacité. 6
Sa tête sans orgueil dépasse à peine l’herbe. 12
Qui durera verra ! 6
15 L’herbe sera fauchée, et la cime superbe 12
Longtemps s’élèvera. 6
L’arbuste pousse vite et son riche feuillage 12
A bientôt recouvert 6
Le jeune arbre sans grâce et sans fleurs, qu’un même âge 12
20 Fait moins fort et moins vert. 6
Sois patient ! le Temps qui sans pitié ravage 12
Et la tige et la fleur 6
De l’arbuste, saura du vieux chêne sauvage 12
Consacrer la valeur ; 6
25 Ses branches se tordant ainsi que des reptiles 12
Croîtront dans l’avenir, 6
Quand on aura perdu des plantes inutiles 12
Même le souvenir. 6
À toi merci, prophète aux strophes téméraires, 12
30 Pour avoir deviné 6
Que le frêle arbrisseau, battu des vents contraires, 12
Était prédestiné ! 6
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