Métrique en Ligne
SSA_1/SSA4
Camille SAINT-SAËNS
RIMES FAMILIÈRES
1890
STROPHES
À M. JACQUES D***
Jeune homme heureux à qui tout sourit dans la vie, 12
Garde bien ton bonheur ! 6
Tu n’as jamais connu la haine ni l’envie ; 12
La paix est dans ton cœur. 6
5 Ta mère n’est plus là : mais ton père est un frère 12
Et ta femme est un ciel ; 6
La coupe qui souvent n’a qu’une lie amère 12
Pour toi n’a que du miel. 6
Peut-être voudrais-tu guerroyer dans l’armée 12
10 Des conquérants de l’Art, 6
Et qu’un jour t’acclamant, pour toi la Renommée 12
Déployât l’étendard. 6
Imprudent ! fuis la route où son clairon résonne ! 12
Elle mène à l’enfer. 6
15 Si la déesse au front nous met une couronne, 12
La couronne est de fer. 6
Tu connaîtras, hélas ! si ton char met sa roue 12
Dans ce chemin glissant, 6
L’ornière qui se creuse, et le froid sur ta joue 12
20 De l’Aquilon puissant ! 6
Tu connaîtras les yeux menteurs, l’hypocrisie 12
Des serrements de mains, 6
Le masque d’amitié cachant la jalousie ; 12
Les pâles lendemains 6
25 De ces jours de triomphe où le troupeau vulgaire 12
Qui pèse au même poids 6
L’histrion ridicule et le génie austère 12
Vous met sur le pavois ! 6
La Gloire est infidèle et c’est une maîtresse 12
30 Plus âpre que la mort. 6
Quand on a le bonheur, à quoi bon cette ivresse ? 12
Crains de tenter le Sort ! 6
Je sais qu’on avertit en vain ceux que dévore 12
La soif de l’inconnu. 6
35 Si le soir est trompeur, souviens-toi qu’à l’aurore 12
Je t’avais prévenu. 6
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