Métrique en Ligne
SIL_5/SIL249
Armand SILVESTRE
LE PAYS DES ROSES
1880-1882
LES DÉSESPÉRÉS
HOSANNA MÉLANCOLIQUE
I
J'ADORE ta Beauté, pour ce qu'elle est pareille 12
A mon Rêve immortel et me parle des cieux, 12
Comme un hymne lointain qui chante à mon oreille. 12
Elle évoque les jours longs et délicieux 12
5 Que j'ai vécus, sans doute, en attendant la vie, 12
Dans quelque monde obscur où mon cœur soucieux 12
Cherche éternellement l'illusion ravie. 12
C'est ce lent souvenir par toi ressuscité 12
Qui t'a soumis mon âme à jamais asservie 12
10 J'ai, sur des fronts divins, déjà vu la fierté 12
Qui fait, devant ton front, s'humilier mon être 12
Et tout mon sang bondir vers mon cœur arrêté. 12
La grâce de ton pas m'a fait te reconnaître. 12
Des coupes autrefois m'ont versé le poison 12
15 Dont ton regard cruel m'enivre et me pénètre. 12
Des coupes dont l'or clair, pareil à l'horizon, 12
S'empourprait, jusqu'au bord, du sang vermeil des nues 12
Et dont la vapeur chaude emportait la raison ; 12
Des coupes qu'à ma main tendaient des vierges nues 12
20 Dont les cheveux flottants jetaient dans l'air du soir 12
Des odeurs qui des tiens vers moi sont revenues, 12
Comme un souffle qui meurt aux trous d'un encensoir. 12
— Sous des arbres plus hauts que les pins et les chênes, 12
Tes immortelles sœurs jadis allaient s'asseoir, 12
25 Et ce sont leurs doigts blancs qui m'ont forgé mes chaînes, 12
Pour le monde vieilli que devait rajeunir 12
L'épanouissement de tes grâces prochaines. 12
J'adore ta Beauté pour ce grand souvenir. 12
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