Métrique en Ligne
SIL_5/SIL122
Armand SILVESTRE
LE PAYS DES ROSES
1880-1882
IMPRESSIONS ET SOUVENIRS
LES CHOSES N'ONT PLUS DE LARMES
A B. MARCEL
CE n'est pas sur nos maux que la Mer se lamente ; 12
Ne berçons plus nos cœurs à la plainte des flots, 12
Car nous ne rendrons pas à l'immortelle amante 12
Celui que dans l'air vide appellent ses sanglots. 12
5 Ariadne, à Naxos, n'attend plus de Thésée ; 12
Les sœurs de Prométhée ont fui le roc amer, 12
Les temps sont abolis et la fable épuisée 12
Qui mêlait l'âme humaine à l'âme de la mer. 12
Loin des mythes sacrés la raison nous entraîne, 12
10 Fermant le cycle d'or des vieux enchantements, 12
Et nous n'écoutons plus le chant de la sirène 12
Tendant ses bras d'écume à de mortels amants. 12
Exilés, par le Temps, de la pitié des choses, 12
N'ayant plus pour patrie un monde fraternel, 12
15 L'homme impie, oublié dans les métamorphoses 12
Immuable poursuit son chemin éternel. 12
Ni les cieux, ni la mer n'ont plus pour son oreille 12
De chansons ou de pleurs, — rien qu'un souffle, qu'un bruit ! 12
Et leur voix inutile, au silence pareille, 12
20 Ne vient plus consoler nos âmes dans la nuit. 12
L'antique parenté de la Terre et du Rêve 12
Ne ceint plus les esprits de ses liens radieux. 12
Dans un morne infini l'homme isolé s'élève 12
Et — des choses plus loin — n'est pas plus près des Dieux ! 12
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