Métrique en Ligne
SAM_3/SAM127
Albert SAMAIN
Au Jardin de l'Infante
1893
I
Le fleuve au vent du soir fait chanter ses roseaux. 12
Seul je m'en suis allé. — J'ai dénoué l'amarre, 12
Puis je me suis couché dans ma jonque bizarre, 12
Sans bruit, de peur de faire envoler les oiseaux. 12
5 Et nous sommes partis, tous deux, au fil de l'eau, 12
Sans savoir où, très lentement. — O charme rare. 12
Que donne un inconnu fluide où l'on s'égare !… 12
Par instants, j'arrêtais quelque frêle rameau. 12
Et je restais, bercé sur un flot d'indolence, 12
10 A respirer ton âme, ô beau soir de silence… 12
Car j 'ai l'amour subtil du crépuscule fin ; 12
L'eau musicale et triste est la sœur de mon rêve. 12
Ma tasse est diaphane et je porte, sans fin. 12
Un cœur mélancolique où la lune se lève. 12
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