Métrique en Ligne
SAM_3/SAM106
Albert SAMAIN
Au Jardin de l'Infante
1893
HIVER
Le ciel pleure ses larmes blanches 8
Sur les jours roses trépassés ; 8
Et les amours nus et gercés 8
Avec leurs ailerons cassés 8
5 Se sauvent, frileux, sous les branches. 8
Ils sont finis les soirs tombants, 8
Rêvés au bord des cascatelles. 8
Les Angéliques, où sont-elles ! 8
Et leurs âmes de bagatelles, 8
10 Et leurs cœurs noués de rubans ?… 8
Le vent dépouille les bocages, 8
Les bocages où les amants 8
Sans trêve enroulaient leurs serments 8
Aux langoureux roucoulements 8
15 Des tourterelles dans les cages. 8
Les tourterelles ne sont plus, 8
Ni les flûtes, ni les violes 8
Qui soupiraient sous les corolles 8
Des sons plus doux que des paroles. 8
20 Le long des soirs irrésolus. 8
Cette chanson — là-bas — écoute, 8
Cette chanson au fond du bois… 8
C'est l'adieu du dernier hautbois, 8
C'est comme si tout l'autrefois 8
25 Tombait dans l'âme goutte à goutte. 8
Satins changeants, cheveux poudrés, 8
Mousselines et mandolines, 8
Ô Mirandas ! Ô Roselines ! 8
Sous les étoiles cristallines, 8
30 Ô Songe des soirs bleu-cendrés ! 8
Comme le vent brutal heurte en passant les portes ! 12
Toutes, — va ! toutes les bergères sont bien mortes. 12
Morte la galante folie, 8
Morte la Belle-au-bois-jolie, 8
35 Mortes les fleurs aux chers parfums ! 8
Et toi, sœur rêveuse et pâlie, 8
Monte, monte, ô Mélancolie, 8
Lune des ciels roses défunts. 8
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