Métrique en Ligne
ROL_2/ROL187
Maurice ROLLINAT
Les Névroses
1883
LES REFUGES
La Sauterelle
À Georges Landry.
Sa tête a l'air d'être en bois peint, 8
Malgré ses mandibules moites ; 8
Elle a l'œil gros comme un pépin. 8
Pareille aux bêtes en sapin, 8
5 Mouton, cheval, bœuf et lapin, 8
Que les enfants ont dans des boîtes, 8
Sa tête a l'air d'être en bois peint, 8
Malgré ses mandibules moites. 8
Grise, elle a les ailes doublées 8
10 De rouge antique ou de bleu clair 8
Qu'on entrevoit dans ses volées 8
Brusques, ronflantes et tremblées. 8
Verte, ses jambes endiablées 8
Sont aussi promptes que l'éclair ; 8
15 Grise, elle a les ailes doublées 8
De rouge antique ou de bleu clair. 8
Elle saute sans nul effort 8
Les ruisselets et les ornières ; 8
Et son coup de cuisse est si fort 8
20 Qu'elle semble avoir un ressort. 8
Puis, quand elle a pris son essor 8
Autour des trous et des marnières, 8
Elle saute sans nul effort 8
Les ruisselets et les ornières. 8
25 La toute petite grenouille 8
La regarde et croit voir sa sœur, 8
Au bord du pacage qui grouille 8
De fougères couleur de rouille. 8
Dans sa rigole où l'eau gargouille, 8
30 Sur son brin de jonc caresseur, 8
La toute petite grenouille 8
La regarde et croit voir sa sœur. 8
Elle habite loin des marais, 8
Sous la feuillée, au pied du chêne ; 8
35 Dans les clairières des forêts, 8
Sur le chaume et dans les guérets. 8
Aux champs, elle frétille auprès 8
Du vieil âne tirant sa chaîne ; 8
Elle habite loin des marais, 8
40 Sous la feuillée auprès du chêne. 8
Nids de taupes et fourmilières, 8
Champignon rouge et caillou blanc, 8
Le chardon, la mousse et les lierres 8
Sont ses rencontres familières. 8
45 Sur les brandes hospitalières, 8
Elle vagabonde en frôlant 8
Nids de taupes et fourmilières, 8
Champignon rouge et caillou blanc. 8
Quand le soleil a des rayons 8
50 Qui sont des rires de lumière, 8
Elle se mêle aux papillons 8
Et cliquette avec les grillons ; 8
Elle abandonne les sillons 8
Et les abords de la chaumière, 8
55 Quand le soleil a des rayons 8
Qui sont des rires de lumière. 8
Cheminant, sautant, l'aile ouverte 8
Elle va par monts et par vaux, 8
Et voyage à la découverte 8
60 De quelque pelouse bien verte : 8
En vain, elle a plus d'une alerte 8
Parmi tant de pays nouveaux, 8
Cheminant, sautant, l'aile ouverte, 8
Elle va par monts et par vaux. 8
65 Son chant aigre est délicieux 8
Pour l'oreille des buissons mornes. 8
C'est l'acrobate gracieux 8
Des grands vallons silencieux. 8
Les liserons sont tout joyeux 8
70 En sentant ses petites cornes ; 8
Son chant aigre est délicieux 8
Pour l'oreille des buissons mornes. 8
Cauchemar de l'agriculteur, 8
Tu plairas toujours au poète, 8
75 Au doux poète fureteur, 8
Mélancolique observateur. 8
Beau petit insecte sauteur, 8
Je t'aime des pieds à la tête : 8
Cauchemar de l'agriculteur, 8
80 Tu plairas toujours au poète ! 8
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