Métrique en Ligne
ROL_2/ROL118
Maurice ROLLINAT
Les Névroses
1883
LES ÂMES
La Voix
Voix de surnaturelle amante ventriloque 12
Qui toujours me pénètre en voulant m'effleurer ; 12
Timbre mouillé qui charme autant qu'il interloque, 12
Son bizarre d'un triste à vous faire pleurer ; 12
5 Voix de surnaturelle amante ventriloque ! 12
Dit par elle, mon nom devient une musique : 12
C'est comme un tendre appel fait par un séraphin 12
Qui m'aimerait d'amour et qui serait phtisique. 12
Ô voix dont mon oreille intérieure a faim ! 12
10 Dit par elle, mon nom devient une musique. 12
Très basse par instants, mais jamais enrouée ; 12
Venant de dessous terre ou bien de l'horizon, 12
Et quelquefois perçante à faire une trouée 12
Dans le mur de la plus implacable prison ; 12
15 Très basse par instants, mais jamais enrouée ; 12
Oh ! comme elle obéit à l'âme qui la guide ! 12
Sourde, molle, éclatante et rauque, tour à tour ; 12
Elle emprunte au ruisseau son murmure liquide 12
Quand elle veut parler la langue de l'amour : 12
20 Oh ! comme elle obéit à l'âme qui la guide ! 12
Et puis elle a des sons de métal et de verre : 12
Elle est violoncelle, alto, harpe, hautbois ; 12
Elle semble sortir, fatidique ou sévère, 12
D'une bouche de marbre ou d'un gosier de bois 12
25 Et puis elle a des sons de métal et de verre. 12
Tu n'as jamais été l'instrument du mensonge ; 12
Ô la reine des voix, tu ne m'as jamais nui ; 12
Câline escarpolette où se berce le songe, 12
Philtre mélodieux dont s'abreuve l'ennui, 12
30 Tu n'as jamais été l'instrument du mensonge. 12
Tout mon être se met à vibrer, quand tu vibres, 12
Et tes chuchotements les plus mystérieux 12
Sont d'invisibles doigts qui chatouillent mes fibres ; 12
Ô voix qui me rends chaste et si luxurieux, 12
35 Tout mon être se met à vibrer, quand tu vibres ! 12
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