Métrique en Ligne
ROD_2/ROD194
Georges RODENBACH
Les Vies Encloses
1896
LA TENTATION DES NUAGES
XII
C'est fini, la légende enfantine des astres, 12
De les croire vivants, de les songer des lis ; 12
La nuit souffre de ses millénaires désastres. 12
C'est fini de rêver le ciel, comme jadis, 12
5 Un champ bleu qu'une main partiale ensemence ; 12
La science le prouve une agonie immense : 12
Soleils mourants dont le décès est calculé ; 12
Déserts nus, sans écho ; cendre de nébuleuses ; 12
Étoiles qui sont des orphelines frileuses ; 12
10 Globes dont le soupir est inarticulé 12
Achevant de périr comme en des léthargies. 12
Ciel qui s'éteint ! Vaste hôpital de l'Infini, 12
Où la lune, antique diseuse d'élégies, 12
Semble malade, tant son visage est blêmi ; 12
15 Tels soirs surtout, elle est plus pâle et délayée : 12
On dirait une hostie, au fil du ciel, noyée ; 12
On dirait un cadran de tour miré dans l'eau ; 12
Lune en exil et que nulle étoile n'escorte ; 12
À l'horizon désert, elle a l'air d'être morte, 12
20 Lune exsangue sur l'oreiller de son halo ! 12
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