Métrique en Ligne
ROD_2/ROD151
Georges RODENBACH
Les Vies Encloses
1896
LES MALADES AUX FENÊTRES
VIII
Charme étrange des teints où la chlorose neige ! 12
Visages vraiment trop pâles pour être heureux, 12
Qui font un peu rêver à des lis dans un piège, 12
Tout blêmes, sauf leurs yeux spacieux et fiévreux 12
5 Brûlant de l'air dont s'inaugure une bougie. 12
Ô vierges ! Leur croissance est un triomphe ardu ; 12
Elles parlent ; et c'est, il semble, une élégie, 12
Un frileux bêlement d'agneau qu'on a tondu ; 12
Car leur voix est de la couleur de leur figure. 12
10 Quelque chose de doux pourtant les transfigure ; 12
Pâles comme la lune, elles ont son halo ! 12
Parfois, quand elles vont se voir dans une glace, 12
C'est comme, tout à coup, si c'était dans de l'eau, 12
Tant leur teint est trop frêle et fond à la surface. 12
15 Douce crise de chair et d'âme ! Éveil d'avril ! 12
Heure où le buste s'orne, où la bouche est émue ; 12
Changer ! Et même la chevelure qui mue ! 12
Et les seins nouveau-nés sur le corps puéril ! 12
Moment si langoureux des surprises nubiles ! 12
20 Pourtant l'eau reste indemne, elle ne souffre pas 12
Quand germe un nénuphar sur ses bords immobiles… 12
Ah ! ces teints de chlorose au seuil des célibats ! 12
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