Métrique en Ligne
ROD_1/ROD97
Georges RODENBACH
Le Règne Du Silence
1891
DU SILENCE
XVII
À l'heure délicate où comme de l'encens 12
Le jour se décompose en molles vapeurs bleues, 12
Va dans l'abandon noir des quartiers finissants, 12
Va donc, ô toi dont l'âme est la sœur des banlieues, 12
5 Toi dont l'âme est morose et souffre au moindre bruit, 12
À travers le faubourg, comme au hasard construit, 12
Le faubourg où la ville agonise et s'achève 12
Dans du brouillard, dans de l'eau morte et dans du rêve… 12
Et vois ! Tout au lointain parmi des fonds aigris 12
10 S'allumer droitement la ligne des lanternes 12
Mettant leur ganse jaune au long des chemins gris. 12
Oh ! Lanternes debout sur les horizons ternes ! 12
Survivance de la lumière dans le soir, 12
Survivance de la jeunesse dans la vie ! 12
15 Ces lueurs devant toi, sur la route suivie, 12
— Calices d'or s'ouvrant en dépit du vent noir — 12
Vois ! C'est tout ce qui reste, en ce doux crépuscule, 12
Du soleil mort, de ta jeunesse qui recule : 12
Quelques vagues espoirs de gloires et d'amours, 12
20 Quelques vagues clartés dans la pâleur des verres 12
Que l'avenir, pareil à ces mornes faubourgs, 12
Te garde en ses mélancoliques réverbères ! 12
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