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Toujours tout droit, sans rien regarder, ils cheminent. |
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Les paysans hargneux de coin les examinent, |
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Et les enfants poltrons se mettent sur un rang |
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Pour les voir. Car ces gueux n’ont pas l’air rassurant. |
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Et pourtant ils ne sont que trois, ces trouble-fête, |
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Et le plus vieux des trois, celui qui marche en tête, |
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N’a pas treize ans. Mais comme ils sont fauves, hagards ! |
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Une implacable horreur habite leurs regards. |
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On sent qu’ils ont souffert, jeûné, veillé. Leurs membres |
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Disent la faim, la soif, le froid noir des décembres, |
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Le soleil lourd, l’averse à flots pointus crevant, |
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L’étape interminable, et les nuits en plein vent. |
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On comprend qu’ils ont bu la brume qui pénètre, |
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Et râlé quelquefois au pied d’une fenêtre |
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Où chantaient et flambaient des rires de catin. |
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Il leur est arrivé de marcher du matin |
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Au soir, et puis du soir au matin sans entendre |
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Le son que fait un sou dans la main qu’il faut tendre. |
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Il leur est arrivé, le ventre creux, de voir |
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Des gens repus qui leur refusaient du pain noir. |
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Et c’est pourquoi leurs cœurs sont des fourneaux de haine. |
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Mais, la maison où vit leur mère étant prochaine, |
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Les voilà doux. Près d’elle ils seront apaisés, |
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Et leur bouche d’enfant rapprendra les baisers. |
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Hélas ! la mère est morte à la tâche. Sa bière |
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Gît sans nom dans un coin perdu du cimetière. |
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Ils ne trouveront pas, ce soir, à leur retour, |
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Pour consoler leur jeûne amer, le pain d’amour. |
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Et demain il faudra repartir par les routes, |
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Et mendier encore, et se nourrir des croûtes, |
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Des restes, des vieux os que l’on dispute aux chiens. |
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Mais les chers innocents, du coup, sont des vauriens. |
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Ils ne pleureront pas ; car l’orgueil les commande, |
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Et l’enfant de douze ans devient un chef de bande. |
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