Métrique en Ligne
RIC_1/RIC106
Jean RICHEPIN
LA CHANSON DES GUEUX
1881
TROISIÈME PARTIE
NOUS AUTRES GUEUX
NOS GLOIRES
IV
À ADRIEN JUVIGNY
(Il préparait alors sa licence es lettres)
Ô candidat, trappeur des verbes grecs, fumiste, 12
Quel problème êtes-vous ? Quel profond alchimiste 12
En vous décomposant pourra répondre au point 12
D’interrogation qui dans ma tête poind ? 12
5 Quel abîme êtes-vous de noire indifférence ? 12
Je sais, pour mon malheur, que l’optatif est rance, 12
Que le discours latin pue et sent le moisi, 12
Et que vous en mangez, Or, je suis cramoisi 12
Quand je vois que depuis trois mois jamais vous n’eûtes 12
10 Le courage de leur ravir quelques minutes 12
Pour venir de mon air me prendre la moitié 12
Et respirer la fleur de ma jeune amitié. 12
J’ai besoin de vous voir, mon cher, car je vous aime. 12
Je voudrais vous montrer un peu ce que je sème, 12
15 Quel arbre ou quel légume est né dans mon jardin. 12
Mais vous lisez Pierrot-Deseilligny, Chardin, 12
Les compilations d’expressions triées 12
Dans l’ignoble latin moderne expatriées ; 12
Vous vivez d’une vie absurde, consumant 12
20 Vos jours à des discours où quelque consul ment, 12
À coups de Quicherat battant la poésie. 12
Ah ! quelle servitude ! Et que la Boëtie 12
A mal fait de ne point la mettre en son traité ! 12
Voyons, mon cher ami, serez-vous arrêté 12
25 Sempiternellement dans cette obscure ornière ? 12
La semaine qui vient est-elle la dernière ? 12
Quand aurez-vous fini ? Quand peut-on vous avoir ? 12
Quand donc laisserez-vous cette crasse au lavoir ? 12
Quand nous reviendrez-vous nettoyé de l’antique. 12
30 Revêtu d’un manteau de pourpre romantique, 12
Portant l’étoile au front ainsi qu’Ithuriel, 12
Chanteur, rêveur et fou, c’est-à-dire réel ? 12
Oh ! venez, ce jour-là ? Près de la cheminée 12
La causerie est longue et jamais terminée. 12
35 Nous causerons, devant quelque verre avalé, 12
De ceci, de cela, de tout, de rien. Vale ! 12
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