Métrique en Ligne
REN_2/REN84
Armand RENAUD
Poésies
1860-1880
LES NUITS PERSANES
LA SOLITAIRE
La Splendeur vide
J 'AI construit dans mon âme 6
Un merveilleux palais, 6
Plein d'odeurs de cinname, 6
Plein de vagues reflets. 6
5 Saphir, ambre, émeraude 6
En couvrent les piliers ; 6
En silence il y rôde 6
Des lions familiers. 6
Dans l'ivoire des coupes, 6
10 Sur les tapis profonds, 6
Des monarques par groupes 6
Y boivent les vins blonds. 6
Isolés comme une île, 6
Les murs s'en vont plongeant 6
15 Dans la nappe tranquille 6
D'un lac de vif-argent. 6
Et tout semble immobile, 6
Et pourtant tout grandit, 6
S'élargit, tache d'huile, 6
20 Monte et s'approfondit. 6
Et de l'onde muette, 6
Et du palais sans bruit, 6
Un feu qui se projette 6
De plus en plus reluit. 6
25 Mais à ce qui m'enchante 6
Deux choses font défaut : 6
Là dedans rien ne chante, 6
Le ciel est noir là-haut. 6
Oh ! pour un son de lyre, 6
30 Oh ! pour le moindre azur, 6
Je laisserais porphyre, 6
Perles fines, or pur. 6
Mais le seul qui la donne, 6
L'Amour, doux et cruel, 6
35 M'interdit ma couronne 6
D'harmonie et de ciel. 6
Et plus tout luit, tout monte, 6
Tout devient vaste et beau, 6
Plus la douleur me dompte, 6
40 Plus je suis un tombeau. 6
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