Métrique en Ligne
REN_2/REN141
Armand RENAUD
Poésies
1860-1880
LES NUITS PERSANES
SONGES D'OPIUM
Le Trône céleste
J 'AI tant levé les prunelles 7
Vers les clartés éternelles 7
Sans fond ni bord, 4
J'ai si bien percé les voiles 7
5 Des sept mystiques étoiles 7
Qui sont au Nord ; 4
Sorti de l'humaine voie, 7
N'éprouvant ni deuil ni joie, 7
Ni froid ni chaud, 4
10 Sans que je boive ni mange, 7
Sans que jamais rien dérange 7
Mes yeux d'en haut, 4
Je les ai tant contemplées 7
Les sept gouttes d'eau gelées 7
15 De l'horizon ; 4
Devant leur tremblante flamme 7
Depuis si longtemps j'ai l'âme 7
En pâmoison, 4
Que cette foule abrutie 7
20 Qui fait encore partie 7
Du monde vil, 4
S'il fallait que j'y revinsse, 7
Me prendrait, tant je suis mince, 7
Pour mon profil ; 4
25 Mais que la troupe céleste, 7
Voyant l'extase où je reste 7
Plus droit qu'un pieu, 4
A travers les airs m'emporte, 7
Du soleil m'ouvre la porte 7
30 Et me fait Dieu. 4
A présent, c'est moi qui règne ; 7
Le bas de mon trône baigne 7
Dans un lac d'or 4
Où, des cent points de l'espace, 7
35 L'image des mondes passe 7
Et passe encor. 4
Sur ce lac flotte une tête 7
A la barbe de prophète, 7
Au front de roi ; 4
40 De l'œil une larme coule. 7
C'est l'ancien Dieu qui s'écroule, 7
Chassé par moi. 4
Et cette tête me charme, 7
Je ne puis de cette larme 7
45 Me détourner. 4
En vain les anges fidèles 7
Viennent d'un million d'ailes 7
Me couronner ; 4
En vain je suis la merveille, 7
50 L'être immense où tout s'éveille, 7
Où tout s'endort ; 4
Je ne vois, ne vois sans cesse 7
Que la tête à barbe épaisse 7
Sur le lac d'or. 4
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