Métrique en Ligne
REN_2/REN127
Armand RENAUD
Poésies
1860-1880
LES NUITS PERSANES
LA MOSQUÉE
La Nuit Sainte
A l'occident, à l'orient, 8
Des savants à quoi bon les veilles ? 8
J'ai vu cette nuit, en priant, 8
Ce qu'ils n'ont pas vu : des merveilles ! 8
5 En vain ils ont fait mille apprêts, 8
Des calculs jusqu'à la syncope ; 8
Il s'agissait là de secrets 8
Voulant la foi pour télescope. 8
Car c'était la plus sainte nuit 8
10 Des sept nuits saintes de l'année, 8
Celle dont à l'homme éconduit 8
La date n'est jamais donnée ; 8
La nuit où prier une fois 8
Compte plus que mille prières 8
15 Dans le reste des douze mois ; 8
La nuit où le sable et les pierres, 8
Les métaux et les diamants, 8
L'air et l'eau, la glace et la flamme, 8
Tout le chaos des éléments, 8
20 Pour s'unir à Dieu, prend une âme. 8
La lave, aux cratères béants, 8
Reluit alors sans qu'elle fume ; 8
La vague, dans les océans, 8
Perd un instant son amertume. 8
25 L'air fait gazouiller le zéphyr 8
Et force l'orage à se taire. 8
Émeraude, opale, saphir 8
Surgissent du sein de la terre. 8
D'éclat, de beauté, de douceur, 8
30 C'est une lutte universelle, 8
Entre l'astre dans sa grosseur 8
Et la perle dans sa parcelle. 8
Et grâce au pouvoir des versets 8
Récités par moi, grâce au nombre 8
35 De mes jeûnes, je saisissais 8
Le mystère remplissant l'ombre. 8
Tout l'univers inanimé 8
Vivait. Un trouble taciturne, 8
Pour atteindre à l'Être innommé, 8
40 Montait en amour de cette urne. 8
Et poème hindou, psaume hébreu 8
N'ont pas d'accents si grandioses 8
Qu'ils vaillent, pour adorer Dieu, 8
Ce chœur muet, montant des choses. 8
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