Métrique en Ligne
REN_2/REN107
Armand RENAUD
Poésies
1860-1880
LES NUITS PERSANES
FLEUR DE SANG
Le Lac des Morts
J 'AI fondu toute une armée 7
Dans le profond alambic 7
D'une vallée enfermée 7
Entre des rochers à pic. 7
5 On a tout tué, de sorte 7
Qu'un lac de sang s'est formé 7
Où, sans prendre aucune escorte, 7
Dans un bateau j'ai ramé. 7
Il faisait nuit, et la lune 7
10 S'émerveillait de se voir, 7
Loin de la blancheur commune, 7
Toute rouge en ce miroir. 7
Autour de moi, quelque chose 7
Dans l'air se vaporisait, 7
15 Qui prenait un reflet rose 7
Quand un rayon s'y posait. 7
Et moi qui tenais la palme 7
De la victoire et du bruit, 7
Je sentis mon cœur si calme 7
20 Que je chantai dans la nuit : 7
« O morts, que pas un ne bouge ! 7
Splendide est votre tombeau, 7
Avec ce linceul si rouge 7
Et ce si pâle flambeau. 7
25 « Dormez, les têtes coupées ! 7
Vous rampiez, souffrants troupeaux. 7
J'ai fait luire les épées. 7
A vous l'éternel repos ! » 7
Et vague, douce, infinie, 7
30 La voix des échos chantait. 7
Du lac tiède, l'harmonie 7
Dans le ciel tiède montait. 7
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