Métrique en Ligne
REN_1/REN22
Armand RENAUD
Recueil intime
1881
II
Plénitude
AH ! laissez-moi chanter, oh ! laissez-moi vous dire 12
Comme j’ai des rayons, comme j’ai du délire, 12
Comme j’ai de l’amour ! 6
Oh ! laissez-moi vous dire et vous redire encore 12
5 Que la nuit me couvrait, et que voici l’aurore, 12
Et que voici le jour ! 6
Depuis longtemps brillaient au meilleur de mon âme 12
Vos longs cheveux flottants, vos yeux baignés de flamme, 12
Votre front souverain. 6
10 Mais j’avais imposé le silence à ma lèvre, 12
Et de mes diamants, mystérieux orfèvre, 12
J’avais fermé l’écrin. 6
Maintenant, mon cœur s’ouvre et mon âme déborde, 12
Et déjà sur ma lyre il n’est plus une corde 12
15 Qui n’exhale un son doux, 6
Quand j’entends votre nom, quand près de vous j’arrive, 12
Quand je vois seulement, comme un feu sur la rive, 12
Une clarté chez vous. 6
Ne me répondez pas que cela vous effraie, 12
20 Que tout enivrement en soi porte une plaie, 12
Que c’est sans guérison ; 6
Que plus un rêve est doux, plus pur est un calice, 12
Et plus, pour l’avenir, l’un révèle un supplice, 12
L’autre cache un poison. 6
25 Je le sais. Loin de moi cette étrange pensée 12
Qu’aux abîmes du ciel j’aurais l’âme lancée, 12
Sans aller m’y meurtrir. 6
Mais j’ai tout accepté ; cela même est ma joie 12
De voir l’amour si fort, si rude pour sa proie, 12
30 Qu’elle en puisse mourir ! 6
Laissez-moi donc baiser la terre qui vous porte. 12
Ma blessure est déjà profonde. Que m’importe ! 12
Je veux l’envenimer. 6
Laissez mes yeux vous voir et mes rêves vous suivre. 12
35 Je suis vaillant et fort, je veux souffrir et vivre, 12
Me briser, vous aimer ! 6
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