Métrique en Ligne
PRU_2/PRU75
René-François SULLY PRUDHOMME
Les Solitudes
1867
LA COLOMBE ET LE LIS
Femme, cette colombe au col rose et mouvant, 12
Que ta bouche entr'ouverte baise, 8
Ne l'avait pas sentie humecter si souvent 12
Son bec léger qui vibre d'aise. 8
5 Elle n'avait jamais reçu de toi tout bas 12
Les noms émus que tu lui donnes, 8
Ni jamais de tes doigts, à l'heure des repas, 12
Vu pleuvoir des graines si bonnes. 8
Elle n'avait jamais senti ton cœur frémir 12
10 Au vivant toucher de son aile, 8
Ni ses plumes trembler sous ton jeune soupir, 12
Ni tes larmes rouler sur elle. 8
Tu la laissais languir captive dans l'osier, 12
Et vainement d'un sanglot tendre, 8
15 D'un sanglot suppliant elle enflait son gosier : 12
Tu ne daignais jamais l'entendre. 8
Jamais les fleurs du vase où rêve le printemps 12
Ne furent si bien arrosées ; 8
Jamais, sur le lis pur et grave, si longtemps 12
20 Tes lèvres ne s'étaient posées. 8
Quel ancien souvenir ou quel récent amour, 12
Quel berceau, femme, ou quelle tombe, 8
A fait naître en ton cœur ce suprême retour 12
Vers ton lit et vers ta colombe ? 8
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