LA LYRE ET LES DOIGTS |
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Une muse, immobile et la tête penchée, |
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Ne chantait plus ; la lyre en soupirait d'ennui, |
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Et, se plaignant aux doigts de n'être plus touchée, |
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Disait : « quelle torpeur vous enchaîne aujourd'hui ? |
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« je ne puis rien sans vous, réveillez-vous, doigts roses ; |
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L'air est si lourd, j'ai peine à vous parler tout bas, |
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Car mes fibres sans vous, comme des lèvres closes, |
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Amoncellent des voix qui ne s'élèvent pas. |
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« abattez-vous sur moi, comme au vol du zéphire |
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On voit dans les rayons tourbillonner les fleurs ; |
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Arrachez-moi mon cri comme au lin qu'on déchire, |
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Ou sur moi, lentement, glissez comme des pleurs. |
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« sinon, si par mépris vous me laissez oisive, |
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Rendez ma double branche au front carré des bœufs ; |
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De quel autre baiser voulez-vous que je vive |
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Que du baiser des doigts qui m'ont faite pour eux ? » |
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— « lyre, que pouvons-nous ? Sommes-nous l'harmonie ? |
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Est-ce nous le délire ? Est-ce nous la langueur ? |
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Et ne sentons-nous pas, esclaves du génie, |
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Tous nos frissons liés par le sommeil du cœur ? |
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« il est le dieu, la main subit sa fantaisie : |
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Parfois il nous trahit sans nous avoir lassés, |
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Et parfois, sans pitié, sa longue frénésie |
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Nous agite sanglants dans les sept fils cassés ! |
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« implore-le toujours, quelques chants que tu veuilles, |
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Car nous les lui devons, les chants que tu nous dois : |
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Sans les brises d'été plus de murmure aux feuilles, |
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Sans les souffles du cœur plus d'éloquence aux doigts ! » |
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