Métrique en Ligne
PRU_2/PRU52
René-François SULLY PRUDHOMME
Les Solitudes
1867
LA VALSE
Dans un flot de gaze et de soie, 8
Couples pâles, silencieux, 8
Ils tournent, et le parquet ploie, 8
Et vers le lustre qui flamboie 8
5 S'égarent demi-clos leurs yeux. 8
Je pense aux vieux rochers que j'ai vus en Bretagne, 12
Où la houle s'engouffre et tourne, jour et nuit, 12
Du même tournoîment que toujours accompagne 12
Le même bruit. 4
10 La valse molle cache en elle 8
Un languissant aveu d'amour. 8
L'âme y glisse en levant son aile : 8
C'est comme une fuite éternelle, 8
C'est comme un éternel retour. 8
15 Je pense aux vieux rochers que j'ai vus en Bretagne, 12
Où la houle s'engouffre et tourne, jour et nuit, 12
Du même tournoîment que toujours accompagne 12
Le même bruit. 4
Le jeune homme sent sa jeunesse, 8
20 Et la vierge dit : « si j'aimais ? » 8
Et leurs lèvres se font sans cesse 8
La douce et fuyante promesse 8
D'un baiser qui ne vient jamais. 8
Je pense aux vieux rochers que j'ai vus en Bretagne, 12
25 Où la houle s'engouffre et tourne, jour et nuit, 12
Du même tournoîment que toujours accompagne 12
Le même bruit. 4
L'orchestre est las, les valses meurent, 8
Les flambeaux pâles ont décru, 8
30 Les miroirs se troublent et pleurent ; 8
Les ténèbres seules demeurent, 8
Tous les couples ont disparu. 8
Je pense aux vieux rochers que j'ai vus en Bretagne, 12
Où la houle s'engouffre et tourne, jour et nuit, 12
35 Du même tournoîment que toujours accompagne 12
Le même bruit. 4
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