Métrique en Ligne
POT_1/POT32
Eugène POTTIER
Chants révolutionnaires
1887
LE FILS DE LA FANGE
A Lucien-Victor MEUNIER, auteur des (Clameurs du pavé).
Elle traîne à demi rongée 8
Sa vieillesse de dix-sept ans ; 8
Sa robe de haillons frangée, 8
Ses bas troués, ses seins pendants. 8
5 Du tapis franc, c'est la femelle. 8
Eh quoi ! cette éponge à vin bleu, 8
Cette fille, cette femelle, 8
Elle est enceinte ! ah ! nom de Dieu ! 8
Pauvre petit être 5
10 Que rien ne défend, 5
Eh quoi ! tu vas naître 5
Comme un autre enfant ? 5
Ta mère, inscrite à la police, 8
Lasse de sa maternité, 8
15 Va mettre bas dans un hospice 8
Ta jeune âme et ton sang gâté. 8
Tu ne sauras rien de ton père : 8
Le vice en rut, le hasard gris, 8
Un soir, ont payé pour te faire, 8
20 Quelques sous pleins de vert-de-gris. 8
Maraudant l'ordure à la halle, 8
T'abrutissant par l'alcool, 8
Tu seras l'enfant de la balle, 8
Du vagabondage et du vol. 8
25 On t'ouvrira le séminaire 8
De l'escarpe et du chourineur, 8
Des élèves de Lacenaire 8
T'enseigneront le point d'honneur. 8
Au crime tout te prédestine. 8
30 Frère ! les mains rouges de sang, 8
Si tu meurs sur la guillotine, 8
Nul ne s'en peut croire innocent. 8
Tu vas où ton milieu te pousse, 8
Fils de la Fange, sang gâté, 8
35 Ah ! qu'au moins ta vie éclabousse 8
Le front de la société ! 8
Pauvre petit être 5
Que rien ne défend 5
Eh quoi ! tu vas naître 5
40 Comme un autre enfant ? 5
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