Métrique en Ligne
NOA_2/NOA286
Anna de NOAILLES
Poèmes de l'Amour
1924
CLVIII
Parce que dès l’enfance et d’instinct tu fus triste, 12
Dans la cité bruyante ou sous les arbres verts, 12
Et que tu fus surpris qu’on souffre, et qu’on persiste 12
À souffrir, brave et lâche, en un morne univers ; 12
5 Parce que la gaîté ne fut sur ta personne 12
Que le manteau lustré d’un fuyant carnaval, 12
Et qu’un sonore ennui en ton âme résonne, 12
Ton cœur hostile et pur est de mon cœur l’égal. 12
Mais malgré cette étrange et noble ressemblance, 12
10 Nous nous sentons divers, lointains, dépossédés. 12
À quoi m’a donc servi ma suave puissance ? 12
J’ai disposé du monde et je ne puis t’aider ! 12
— Que faire si vraiment le destin se refuse, 12
(Tandis que ta langueur recherche un calme oubli) 12
15 À t’imposer, plus tendre et reposant qu’un lit, 12
Mon cœur qui s’affermit en même temps qu’il s’use… 12
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