Métrique en Ligne
NOA_1/NOA127
Anna de NOAILLES
Les Vivants et les Morts
1913
IV
LES TOMBEAUX
PUISQU'IL FAUT QUE LA MORT…
Puisqu'il faut que la mort sépare enfin les êtres, 12
Quel que soit le constant et volontaire amour, 12
O toi qui vis encor, je bénirai le jour 12
Où le destin, murant ma porte et mes fenêtres, 12
5 M'enferma brusquement dans son austère tour 12
Où jamais l'Espérance au doux chant ne pénètre. 12
J'ai souffert, mais du moins n'aurai-je point par toi 12
Connu cette rusée et lugubre victoire 12
De demeurer vivante, alors qu'un brick étroit 12
10 Entraîne un passager vers les rives sans gloire… 12
— Vivre quand ils sont morts ! Respirer les saisons ! 12
Voir que le temps sur eux s'épaissit et s'étire ! 12
Commettre chaque jour cette ample trahison, 12
Ne pouvoir échanger nos maux contre leur pire, 12
15 Et, relayant parfois leur inerte martyre, 12
Nous étendre le soir en leur froide prison, 12
Tandis que leurs doux corps rentrent dans les maisons… 12
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