Métrique en Ligne
MUS_4/MUS127
Alfred de MUSSET
POÉSIES POSTHUMES
1824-1857
Le Trois Mai 1814
I
Ce fut un triste jour. Les soldats de l’Empire 12
Comme des peupliers se penchaient sans rien dire. 12
Le bon roi regardait comme en ordre ils marchaient, 12
Tel un pâtre, héritier de la harpe d’un barde, 12
5 Et la voyant d’ivoire, et la pèse et la garde — 12
Les pleurs dans leurs yeux se séchaient. 8
II
Oh ! la froide Russie aux éternelles neiges 12
C’était d’un autre pas que marchaient ses cortèges 12
Où l’homme au manteau gris leur servait de drapeau, 12
10 Et du grand horizon sortait sa large tête ; 12
Et tous ne demandaient, pour marcher à la fête, 12
Qu’à voir le coin de son chapeau. 8
III
A ses âpres pensers leur vie était trempée ; 12
Son sceptre était de fer, mais c’était une épée ! 12
15 La Seine est trop paisible à qui passa le Rhin. 12
Si du temple de gloire hérite Magdeleine, 12
Ainsi, les aigles noirs de la colonne reine 12
Vont fermer leurs ailes demain. 8
IV
Oh ! c’est qu’à ce grand peuple il fallait sa grande âme, 12
20 C’est que, d’un dur caillou pour que sorte la flamme, 12
Il faut l’éperon d’or ou l’ongle du coursier. 12
Maintenant, dans leur cœur, tout est désert et vide : 12
C’est que tout grand vaisseau veut l’aquilon pour guide, 12
Toute main ferme un gant d’acier 8
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