Métrique en Ligne
MUR_1/MUR31
Henri MURGER
Les Nuits d'hiver
1861
SI TU VEUX ÊTRE LA MADONE
Si tu veux être la madone, 8
Vierge comme elle, ô mes amours ! 8
Dis un mot, et mon ciseau donne 8
Au marbre blanc tes purs contours. 8
5 Des saintes qu'à Rome on admire 8
Tu seras la plus belle encor, 8
Et les poëtes, pour le dire, 8
Vont préparer leur plume d'or. 8
À ton gré choisis, — marbre ou toile, 8
10 Statue ou tableau, — dès demain, 8
Pour mettre à ton front une étoile, 8
Mon cœur viendra guider ma main. 8
Si tu veux être la madone, 8
Dans une châsse de vermeil 8
15 On viendra t'offrir pour couronne 8
Le lis pur, à ton front pareil ; 8
Et, si tu veux, ô ma divine ! 8
Bientôt ton image à l'autel 8
Rendra jalouse Fornarine, 8
20 La maîtresse de Raphaël. 8
Sous les piliers de ton église, 8
Des pèlerins, de loin venus, 8
Inclineront leur barbe grise 8
Sur la blancheur de tes pieds nus ; 8
25 Et ceux que le bourreau menace, 8
Guidés par un esprit sauveur, 8
Viendront chercher asile et grâce 8
À ton piédestal protecteur. 8
Puisque ton front toujours se voile 8
30 Quand je veux y mettre un baiser, 8
Sur ton image, — marbre ou toile, 8
Oh ! Du moins laisse-moi poser ! 8
Laisse-moi poser, ô Marie ! 8
Pour baiser, pour sceau radieux, 8
35 L'immortalité du génie ; — 8
C'est un manteau qu'ont mis les dieux. 8
Si tu veux être la madone, 8
Vierge comme elle, ô mes amours ! 8
Dis un mot, et mon ciseau donne 8
40 Au marbre blanc tes purs contours. 8
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