Métrique en Ligne
MRT_4/MRT202
Albert MÉRAT
Les Triolets des Parisiennes de Paris
1900
TRIOLETS DES BELLES MORTES
OU DES MORTES D'AMOUR
Elles fleurissaient de mon temps 8
Et c'étaient les belles des belles, 8
Voici plus de quelques instants ; 8
Elles fleurissaient de mon temps. 8
5 Leur grâce, honneur de mes vingt ans, 8
Ne connut pas de cœurs rebelles. 8
Elles fleurissaient de mon temps 8
Et c'étaient les belles des belles. 8
La mort, épargnant la beauté, 8
10 A pris beaucoup de ces chéries ; 8
Comme on fauche les fleurs d'été 8
La mort épargne la beauté. 8
Trop, hélas ! n'ont pas hésité : 8
Plutôt éteintes que flétries ! 8
15 La mort épargnant la beauté, 8
A pris beaucoup de ces chéries. 8
Eurent-elles tort, celles-là 8
Qui nous firent beaucoup de peine ? 8
L'oiseau qu'on aime s'envola. 8
20 Eurent-elles tort, celles-là ? 8
Mineur de la sonate en la, 8
Mélancolique cantilène ! 8
Eurent-elles tort, celles-la 8
Qui nous firent beaucoup de peine ? 8
25 Mourir, durer, lequel vaut mieux ? 8
Partir par un coup de folie, 8
Dans sa gloire fermer les yeux ? 8
Mourir, durer, lequel vaut mieux ? 8
Sans l'horreur des derniers adieux, 8
30 Avec des fleurs comme Ophélie ! 8
Mourir, durer, lequel vaut mieux ? 8
Partir par un coup de folie ! 8
Avec la fraise de son sein, 8
Avec la rose de sa bouche 8
35 Qui souffle un souffle pur et sain ? 8
Avec la fraise de son sein ? 8
Pour rien, sans un autre dessein 8
Que d'éviter l'âge farouche. 8
Avec la fraise de son sein, 8
40 Avec la rose de sa bouche. 8
Car le temps est vil et cruel : 8
Il maltraite, blesse, estropie 8
La jeunesse qui vaut le ciel. 8
Car le temps est vil et cruel. 8
45 Aux beaux cheveux d'ambre et de miel 8
Il mêle un jour sa neige impie. 8
Car le temps est vil et cruel : 8
Il maltraite, blesse, estropie. 8
Offensant ce qui nous est cher, 8
50 Il ose un jour tracer des rides 8
Sur la merveille de la chair, 8
Offensant ce qui nous est cher. 8
Il flétrit le sourire clair 8
De ses froides lèvres arides. 8
55 Offensant ce qui nous est cher, 8
Il ose un jour tracer des rides. 8
Que seraient-elles aujourd'hui 8
Les belles qui tenaient nos âmes 8
Quand leurs regards nous avaient lui ? 8
60 Que seraient-elles aujourd'hui ? 8
Vivre encore leur aurait nui, 8
Mortes charmantes, pauvres femmes ! 8
Que seraient-elles aujourd'hui 8
Les belles qui tenaient nos âmes ? 8
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