Métrique en Ligne
MLV_1/MLV63
Charles MILLEVOYE
POÉSIES
1801-1814
POÉSIES LÉGÈRES
LE POËTE VOLÉ
CHANSON
Dans cette pièce l'auteur raconte sa propre mésaventure. Des voleurs adroits l'avaient complètement dévalisé.
Mes amis, on prétend à tort 8
Qu'un poète n'est pas volable ; 8
Aujourd'hui de ce triste sort 8
Je suis l'exemple déplorable. 8
5 Rien n'est plus vrai : Rias nouveau, 8
N'ayant rien pour être plus leste, 8
Je puis répéter in petto 8
Mon omnia mecum porto 8
C'est une douceur qui me reste. 8
10 Comme on avait sans doute appris 8
Mon peu de goût pour la parjure, 8
Habits, linge, l'on m'a tout pris, 8
Malgré cadenas et serrure. 8
De mon mobilier peu content, 8
15 On a saisi d'une main preste 8
Trente-six francs d'argent comptant… 8
Ce qui me console pourtant, 8
C'est qu'on ne prendra pas le reste. 8
J'en voudrais presque au garnement 8
20 Qui, sans pitié pour mes alarmes, 8
Ne m'a pas laissé seulement 8
Un mouchoir pour sécher mes larmes ; 8
Mais il respecta mes écrits 8
En voleur discret et modeste. 8
25 Venez, innocents manuscrits, 8
Petits vers, avortons chéris ! 8
Tenez-moi lieu de tout le reste. 8
Prenons notre parti gaîment ; 8
N'ai-je pas des grâces à rendre ? 8
30 On m'a laissé fort galamment… 8
Tout ce qu'on n'a pas pu me prendre. 8
Après tout, si je suis volé, 8
J'ai pour braver mon sort funeste, 8
Avec un cœur tout consolé, 8
35 Ma bonne humeur et mon Églé : 8
Cela vaut mieux que tout le reste. 8
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