Métrique en Ligne
MLV_1/MLV42
Charles MILLEVOYE
POÉSIES
1801-1814
POËMES
EMMA ET ÉGINARD
Muse d'amour et de mélancolie, 10
Qui, dédaignant les frivoles concerts 10
Du luth badin monté par la Folie, 10
Cherches au loin, rêveuse et recueillie, 10
5 L'ombre des bois et la paix des déserts, 10
Inspire-moi ! Rends ma voix douce et pure 10
Comme les flots du ruisseau qui murmure ! 10
Or, écoutez, cœurs tendres, cœurs aimants ! 10
Mon fabliau, de deux jeunes amants, 10
10 Va vous conter la touchante aventure, 10
Et d'un grand roi qu'admire l'univers 10
Le nom fameux ennoblira mes vers. 10
Partout vainqueur, le puissant Charlemagne 10
Avait enfin écrasé tout entier 10
15 Ce Vitikind, l'aigle de l'Allemagne, 10
D'Arminius ce terrible héritier. 10
Laissant enfin respirer la victoire, 10
Le grand monarque, au milieu de sa gloire, 10
Goûtait dans Aix un repos fortuné. 10
20 De paladins sans cesse environné, 10
Aux jeux guerriers il formait leurs courages : 10
Tantôt, des bois parcourant les ombrages, 10
Il renversait sous un épieu sanglant . 10
Le daim rapide et le chevreuil tremblant, 10
25 Les sangliers et les buffles sauvages ; 10
Tantôt dressait sur le terrain poudreux 10
Les destriers réservés aux batailles ; 10
Tantôt fendait de ses bras vigoureux 10
Le flot captif en des bassins nombreux ; 10
30 Ou plus tranquille, au sein de ses murailles, 10
Interrogeait du Celte et du Gaulois 10
Les simples mœurs et les naïves lois. 10
Il reproduit ces hymnes inspirées 10
Qui sur la harpe, aux vieux jours d'Israël, 10
35 Montaient vers Dieu des hauteurs du Carmel, 10
Et du Jourdain charmaient les eaux sacrées. 10
Autour de lui les arts obéissants 10
Ont prodigué les travaux renaissants : 10
Des tiers Romains la noble architecture 10
40 Vient décorer la demeure des rois, 10
De la chapelle étend la voûte obscure, 10
L'arceau gothique et les parvis étroits. 10
Par cent canaux cette onde sulfureuse 10
Que lentement jaunirent les métaux, 10
45 Multipliant sa vertu généreuse, 10
Soutient la vie, et détourne les maux. 10
Tout se revêt d'une pompe inconnue : 10
La tour s'allonge et monte dans la nue ; 10
Le cirque s'ouvre en son immensité ; 10
50 Où s'enfonçaient de profondes tanières, 10
Du pavillon s'agitent les bannières, 10
Et le désert se transforme en cité. 10
Digne ornement de la cour paternelle, 10
La jeune Emma, si naïve et si belle, 10
55 Depuis six mois brillait dans ce séjour. 10
Princes et rots vont la priant d'amour. 10
Par des hauts faits et de grands coups de lance, 10
Maint chevalier sollicite son choix, 10
Et, prodiguant carrousels et tournois, 10
60 Sous ses couleurs dans les joules s'élance 10
Vœux superflus ! Éginard a charmé 10
Ce cœur sans art qui s'ignorait encore. 10
Humble est sou nom, mais l'honneur le décore : 10
Il est aimable, il aime, il est aimé. 10
65 Sujet zélé d'un prince magnanime, 10
De Charlemagne il a toute l'estime. 10
Soit au conseil, soit au champ des combats, 10
Il suit partout ce maître qu'il révère, 10
Et tour à tour du glaive arme son bras, 10
70 Et de Clio lient la plume sévère. 10
Tant que brillait l'astre enflammé du jour, 10
Des deux amants la tendresse captive 10
Trompait les yeux d'une cour attentive ; 10
Le froid respect déguisait leur amour. 10
75 ( Amour caché devient encor plus tendre. ) 10
Mais quand des nuits le crêpe allait s'étendre, 10
Emma fuyait le royal appareil, 10
Et regagnait l'asile du sommeil. 10
Là, chaque soir, vers cet humble ermitage, 10
80 Que des jardins protégeait le feuillage, 10
Sous les balcons, Éginard de retour 10
Lui racontait les longs ennuis du jour ; 10
EL dans l'espoir d'un consolant mensonge, 10
lis se quittaient pour se revoir en songe. 10
85 Oh ! que le jour s'écoulait lentement ! 10
Quand le soleil sur la nature entière 10
Darde ses feux, Éginard tristement 10
Accuse, hélas ! sa jalouse lumière. 10
Astre plus doux, astre pâle et charmant ! 10
90 Sur l'univers il t'invite à descendre, 10
Et par ce chant mélancolique et tendre 10
Sa voix t'invoque et te dit son tourment : 10
Heure du soir ! heure paisible et sombre, 10
Descends des cieux sur ton char nébuleux ! 10
95 Du jour trop lent viens éteindre les feux, 10
Et verse-nous les bienfaits de ton ombre ! 10
Pour qui d'absence a gémi tout le jour, 10
Heure du soir est aurore d'amour. 10
Dos qu'entr'ouvrant la porte orientale 10
100 L'aube vermeille a réjoui les cieux, 10
Do nos forêts l'hôte mélodieux 10
Vient saluer l'étoile matinale ; 10
Mais, pour deux cœurs séparés tout le jour, 10
Heure du soir est aurore d'amour. 10
105 L'astre éclatant, sur son trône de flamme, 10
Des nuits en vain bannit l'obscurité ; 10
Quand sur le monde il répand sa clarté, 10
L'ombre des nuits est en cor dans mon âme. 10
Pour un amant qui languit tout le jour, 10
110 Heure du soir est aurore d'amour. 10
Trois fois déjà la nocturne courrière 10
Avait rempli sa paisible carrière ; 10
Au front des cieux, le troisième croissant 10
Arrondissait son disque pâlissant, 10
115 Depuis qu'Amour d'une chaîne fleurie 10
Avait uni ces fidèles amants, 10
Et que du soir l'ombre douce et chérie 10
Favorisait leurs rendez-vous charmants. 10
Voilà qu'un jour, jour de gloire et d'alarmes, . 10
120 Du jeune amant le roi s'approche et dit : 10
« Brave Éginard, cours préparer tes armes ! 10
De mon repos Irène s'enhardit ; 10
J'ai pénétré sa sombre politique. 10
Le froid Germain, l'orgueilleux Bavarois, 10
125 Le fier Saxon, terrassé tant de fois, 10
Vendent leurs bras à sa querelle antique ; 10
Et l'habitant des bords de la Baltique, 10
Et d'Attila le descendant grossier, 10
A ses destins viennent s'associer 10
130 Tous périront. Point de paix, point de trêve ! 10
Je n'aurai pas en vain repris le glaive. 10
A ta valeur, à ton zèle assidu, 10
Brave Éginard, un noble prix est dû ; 10
Viens l'obtenir : aux champs de la victoire, 10
135 Je te promets les périls et la gloire. » 10
Il dit, s'éloigne : Éginard confondu 10
Reste sans voix ; sa douleur est tranquille. 10
Morne et pensif, il demeure immobile, 10
Pareil au flot durci par les hivers, 10
140 Et dans ses yeux roulent des pleurs amers. 10
Quitter Emma ! languir séparé d'elle ! 10
Dans ses faveurs que la gloire est cruelle ! 10
L'espoir si doux de revenir vainqueur 10
En d'autres temps eût enivré son cœur ; 10
145 Mais juge, Emma, si sa flamme est sincère ! 10
Môme à la gloire Éginard te préfère. 10
Le lendemain, dès le réveil du jour, 10
S'est déployé l'étendard des conquêtes ; 10
Et Charlemagne au milieu de sa cour 10
150 A des combats prélude par des fêtes. 10
De toutes parts brillent les boucliers ; 10
De toutes parts les jeunes chevaliers, 10
Rêvant déjà les hautes aventures, 10
L'œil enflammé, polissent leurs armures. 10
155 La lance au poing, l'un exerce en champ clos 10
Son destrier fatigué du repos ; 10
L'autre, aux caveaux des vieilles basiliques, 10
De ses aïeux vient toucher les reliques, 10
Ou visiter la tombe des héros. 10
160 Loin des regards, beautés mélancoliques ! 10
Vous achevez, en les baignant de pleurs, 10
Les tendres nœuds de rubans et de fleurs, 10
De nœuds plus doux images symboliques. 10
Plus d'une aussi, pour l'ami de son cœur, 10
165 Porte une offrande à la sainte chapelle, 10
Priant tout haut qu'il revienne vainqueur, 10
Priant tout bas qu'il revienne fidèle. 10
Le ménestrel commence ses chansons. 10
Du flageolet, de la tendre guitare 10
170 Pour les héros il renforce les sons, 10
Et sa romance au combat les prépare : 10
Preux chevaliers, honneur du vieux pavois ! 10
De Charlemagne entendez-vous la voix ? 10
Servants d'amour, la guerre vous réclame. 10
175 Que chacun s'arme, et défende à la fois 10
Son Dieu, son roi, son pays et sa dame. 10
Lance en arrêt, marchez, vaillants rivaux ! 10
Le fier Roland préside à vos travaux, 10
Le fier Roland qui rendit sa grande Âme 10
180 En détendant, aux champs de Roncevaux, 10
Son Dieu . son roi, son pays et sa dame. 10
Vous reviendrez briller dans les tournois ; 10
Les ménestrels rediront vos exploits ; 10
Et vous verrez celle qui vous enflamme 10
185 Presser la main qui servit à la fois 10
Son Dieu, son roi, son pays et sa dame. 10
Les cris du brave et l'hymne des combats, 10
Triste Éginard, ne te raniment pas ; 10
Et leur signal redouble encor tes larmes. 10
190 Tel un coursier qu'amour vient assaillir. 10
Mort pour la gloire, entend sans tressaillir 10
L'aigre clairon qui l'appelle aux alarmes : 10
Tel Éginard languit au bruit des armes. 10
N'importe, hélas ! il faut partir Demain 10
195 De la Baltique il suivra le chemin. 10
De son départ l'affligeante nouvelle 10
N'a point encor d'une amante fidèle 10
Déchiré l'âme : heureuse par l'espoir, 10
Elle attendait le rendez-vous du soir. 10
200 C'était aux jours où le printemps frissonne, 10
Craignant l'hiver qui revient quelquefois 10
D'une main brusque arracher sa couronne. 10
De la tempête au loin mugit la voix, 10
Et dans les airs l'ouragan tourbillonne. 10
205 Éginard, seul, au vaste sein des nuits, 10
Marche escorté de ses muets ennuis, 10
Et la nature, un moment gémissante, 10
A ses douleurs semble compatissante. 10
Des lieux aimés s'approchant lentement, 10
210 Il les regarde, et s'arrête, et soupire. 10
« O mon Emma !… n dit-il : sa voix expire. 10
Emma lui parle, et parle vainement ; 10
De l'aquilon le long rugissement 10
Couvre à grand bruit le faible et doux langage. 10
215 « Ta voix chérie expire dans l'orage, 10
Crie Éginard ; l'ouragan sans pitié 10
De tes accents me ravit la moitié. 10
Oh ! laisse-moi de ta retraite obscure 10
Franchir le seuil d'un pied respectueux. 10
220 Comme ton cœur ma flamme est noble et pure : 10
Amour sincère est toujours vertueux. » 10
Emma l'écoute, hésite… la tempête 10
Gronde en fureur ; Éginard sur sa tête 10
Entend rouler les vents impétueux. 10
225 D'épais frimas la bruyère se couvre. 10
Emma le plaint. La porte enfin s'entr'ouvre, 10
Et la pudeur se confie à l'amour. 10
Peindrai-je, Emma, ton paisible séjour ? 10
Des saints martyrs les figures gothiques 10
230 Ornent des murs les pilastres antiques ; 10
Le chapelet, et l'eau sainte, et la croix, 10
Sont suspendus aux modestes parois. 10
Vierge du ciel ! ton image chérie 10
Est pour Emma le plus riche trésor : 10
235 C'est devant toi, douce et chaste Marie, 10
Qu'à son réveil chaque jour elle prie… 10
Demain, hélas ! l'osera-t-elle encor ? 10
Un seul flambeau, qui, Je ses clartés sombres, 10
Perce à demi l'obscurité du soir, 10
240 Luit doucement : tel un rayon d'espoir 10
Du noir chagrin vient éclaircir les ombres ; 10
Faible rayon qui, pour quelques moments, 10
A d'Éginard suspendu les tourments ! 10
Qu'à ses regards son Emma paraît belle ! 10
245 Ses yeux longtemps restent fixés sur elle. 10
Trouble enchanteur ! muets ravissements ! 10
Ils se parlaient jusque dans leur silence, 10
Car les soupirs sont la voix des amants. 10
Mais Éginard aux pieds d'Emma s'élance. 10
250 De son Emma sa main presse la main. 10
Un souffle ardent s'échappe de leur âme ; 10
Il se confond, et leurs lèvres de flamme 10
Sans se chercher se rencontrent soudain 10
Dans tous leurs sens court et se précipite 10
255 Un feu rapide. Emma son sein palpite ; 10
Elle rougit et pâlit tour à tour. 10
Une ombre humide, un nuage d'amour 10
Voile ses yeux ; elle tremble, chancelle ; 10
Mais tout à coup : « Fuis, Éginard ! dit-elle, 10
260 Pour ton Emma montre-toi généreux. 10
Fuis, Éginard, sauve-moi de moi-même ! 10
— Te fuir, Emma ! te fuir !… Ah ! malheureux ! 10
Trop tôt, hélas ! je perdrai ce que j'aime ; 10
Demain… — Qu'entends-je ? — Hélas ! tel est mon sort, 10
265 Demain je pars à la voix de mon maître, 10
Je cours chercher la victoire ou la mort. 10
Cet entretien est le dernier peut-être. » 10
Emma frissonne. « Ah ! poursuit Éginard, 10
Peut-on jamais se séparer trop tard ! 10
270 O mon Emma ! que les feux de l'aurore 10
A tes genoux me retrouvent encore ! » 10
Ainsi parlait Éginard éperdu. 10
Emma se tait : c'est avoir répondu. 10
Son cœur pourtant n'était pas sans alarmes, 10
275 Et murmurait des reproches confus. 10
Un long baiser, triste, mais plein de charmes, 10
Fit sur sa bouche expirer le refus, 10
Et le bonheur naquit du sein des larmes. 10
Ne craignez point mes accords indiscrets, 10
280 Couple amoureux ! ma lyre sait se taire : 10
La poésie, amante du mystère, 10
Au dieu du jour voilera vos secrets. 10
Dans ces instants d'ivresse renaissante 10
Les deux amants oubliaient l'univers ; 10
285 Et cependant la neige éblouissante 10
Avec lenteur descend du haut des airs. 10
A peine aux cieux la lumière est rendue, 10
L'amant d'Emma, sur la morne étendue, 10
Silencieux, fixe l'œil : « De mes pas, 10
290 Dit-il enfin, si l'empreinte perfide 10
Allait guider le soupçon trop rapide ? » 10
Emma répond : « A travers les frimas, 10
Forte d'amour, ne puis-je pas moi-même 10
Loin de ces lieux porter celui que j'aime ? 10
295 Viens, Éginard, fuyons, ne tardons pas ! » 10
Et, soulevant son amant dans ses bras, 10
En frissonnant d'amour et d'épouvante, 10
Elle l'emporte, et la neige mouvante 10
Crie et fléchit sous ses pieds délicats. 10
300 Dans le trajet l'amour les accompagne. 10
Ils approchaient du terme ; Charlemagne, 10
Laissant errer ses regards incertains, 10
De l'Occident méditait les destins. 10
Il voit… Un songe, une vaine chimère, 10
305 L'abusent-ils ? O trop malheureux père ! 10
Que feras-tu ? Quel supplice assez prompt 10
Sur Éginard vengera ton affront ? 10
Lorsque le jour eut coloré la nue, 10
Les deux amants par son ordre appelés, 10
310 L'effroi dans l'âme, interdits et troublés, 10
Baissant les yeux, paraissent à sa vue ; 10
Et sur leur front une vive couleur 10
A remplacé l'amoureuse pâleur. 10
Il les regarde ; et d'un accent sévère : 10
315 «Levez les yeux, répondez sans détour ; 10
Je veux surtout, je veux qu'on soit sincère : 10
Si, possédé d'un criminel amour, 10
Un serviteur d'une obscure naissance 10
Croyait pouvoir avec impunité 10
320 Trahir l'honneur et la reconnaissance 10
Et les saints nœuds de l'hospitalité 10
Si cet ingrat, .lâchement téméraire, 10
Déshonorait la fille de son roi, 10
Prenez ma place, et prononcez pour moi ; 10
325 Au criminel assignez son salaire, 10
Parlez ! » Tous deux embrassent ses genoux. 10
« C'en est assez, poursuit-il, levez-vous ! 10
Je vois l'arrêt qu'il faut que je prononce : 10
Dans un instant vous saurez ma réponse. » 10
330 Il sort. Emma, d'une mourante voix : 10
« Embrassons-nous pour la dernière fois, 10
Objet chéri que j'ai rendu coupable ! 10
Dans un instant on va nous séparer ; 10
Et pour jamais. — Ah ! plutôt expirer ! 10
335 Nous séparer ! non, rien n'en est capable ; 10
Le tombeau seul Si le ciel veut ma mort, 10
O mon Emma ! par un dernier effort, 10
Pour me pleurer consens à me survivre, 10
Et jure-moi — Je jure de te suivre. » 10
340 Mais Charlemagne est déjà de retour. 10
Des paladins, des barons de sa cour 10
A ses côtés parait la noble élite. 10
Tous, l'observant d'un regard curieux, 10
Cherchent en vain sur son front sérieux 10
345 A démêler quel projet il médite. 10
La jeune Emma captive aussi les yeux. 10
Pudeur ! amour ! votre incarnat colore 10
Ses traits charmants de douleur obscurcis ; 10
Et la douleur les embellit encore. 10
350 Le roi des preux au trône s'est assis : 10
« Nobles seigneurs, compagnons de ma gloire, 10
Vous me suivrez aux champs de la victoire ! 10
Vous, Archambaut, propagez toutefois 10
Ce code utile, ami de l'innocence, 10
355 Dont j'ai dicté les prévoyantes lois ; 10
Et que mes lois régnent en mon absence ! 10
Vous, Adelard, par vos efforts constants, 10
De l'ignorance écartez les nuages ; 10
Éclairez-nous des flambeaux que les sages 10
360 Ont allumés sur la route des temps ! 10
Vous tous, du Dieu que l'univers adore 10
Parez le temple et parfumez l'autel ; 10
Que l'hymne saint, plus solennel encore, 10
Arrive au pied de son trône immortel ! 10
365 Rendons le ciel à nos armes propice 10
Par la valeur, surtout par la justice. 10
Juste est l'arrêt que je vais prononcer ; 10
Je sais punir ; je sais récompenser. 10
A mes bienfaits si quelqu'un doit prétendre, 10
370 C'est Éginard ! Éginard, sois mon gendre ! » 10
Les chevaliers, jaloux d'un tel honneur, 10
Mais conservant loyauté pour devise, 10
Confessent tous avec grâce et franchise 10
Que leur rival mérite son bonheur. 10
375 L'heureux coupable et sa douce compagne 10
Viennent baiser la main de Charlemagne, 10
Non sans rougir ; et dès le même jour 10
Le chaste hymen consacra leur amour. 10
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