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MLV_1/MLV12
Charles MILLEVOYE
POÉSIES
1801-1814
ÉLÉGIES
LIVRE PREMIER
PRIÈRE A LA NUIT
Du jour sœur paisible et voilée. 8
Qui, sur la terre consolée 8
Versant le baume du repos, 8
Couronnes ta tète étoilée 8
5 D'un diadème de pavots, 8
O Nuit ! pardonne si ma lyre, 8
Frémissant au gré du zéphyre 8
Parmi les saules de ces bords, 8
Ose un instant par ses accords 8
10 Troubler la paix de ton empire. 8
J'ai vu le disque étincelant 8
S'éteindre aux humides demeures, 8
Et le groupe léger des Heures 8
Suivre ton char en se voilant. 8
15 Tout dort ; et moi, seul, en silence, 8
Aux lueurs d'un pâle flambeau, 8
Devant ton trône je balance 8
Des suppliants l'humble rameau. 8
Je n'invoque point ton mystère 8
20 Pour aller ravir à sa mère 8
Une vierge au cœur ingénu, 8
Qui, solitaire et sans défense, 8
Achève, le sein demi-nu, 8
Son dernier songe d'innocence. 8
25 Je ne vais point d'un seuil jaloux 8
Tenter la roule détournée, 8
Et par un furtif hyménée 8
Venger, en dépit des verrous, 8
La jeune épouse condamnée 8
30 Au froid baiser d'un vieil époux. 8
Mes vœux sont purs. O Nuit sacrée ! 8
Fais qu'un songe à l'aile dorée, 8
Avant le retour du soleil, 8
Vienne de l'image adorée 8
35 Enchanter mon heureux sommeil. 8
Pour toi, déité que j'implore, 8
Je veux sur le bord des ruisseaux 8
Unir le pâle sycomore 8
A l'if, ornement des tombeaux ; 8
40 Jusques à l'aurore prochaine, 8
De l'amour charmant les douleurs, 8
Je veux à ton autel d'ébène 8
Consacrer un hymne et des fleurs. 8
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