Métrique en Ligne
MIK_1/MIK9
Éphraïm MIKHAËL
Œuvres
1884-1890
POÉSIE
L’Âme Mièvre
À Camille Bloch.
Maintenant j’ai revu les moissons oubliées, 12
Et, dans la paix des soirs pleins de saines senteurs, 12
Les rudes moissonneurs, près des gerbes liées, 12
Croisant leurs bras avec des gestes de lutteurs. 12
5 Maintenant j’ai revu les forêts et les plaines 12
Et j’ai marché dans les pâturages herbeux ; 12
Ma gorge a respiré les puissantes haleines 12
Qui montent du sol roux blessé par les grands bœufs. 12
Mais, comme un empereur parmi les foules viles, 12
10 Je suis passé dans la campagne, indifférent ; 12
Car toujours, en mon cœur, l’impur amour des villes 12
Chantait plus haut que la forêt et le torrent. 12
Dans les routes des bois et dans les fraîches sentes, 12
Les augustes frissons des vieux arbres hautains 12
15 Ne me faisaient songer qu’à des robes absentes, 12
Et les ciels me faisaient regretter les satins. 12
Quand un vent balsamique arrivait des vallées, 12
J’avais des souvenirs pervers de parfums lourds ; 12
Et les soleils épars dans les nuits constellées 12
20 N’étaient pour moi que des bijoux sur du velours. 12
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