Métrique en Ligne
MIC_1/MIC9
Louise MICHEL
ŒUVRES POSTHUMES
1900-1910
AVANT LA COMMUNE
CURTIUS
Au milieu du forum s’ouvre un gouffre effrayant, 12
Et l’invincible ville a peur en s’éveillant, 12
Du sinistre miracle. 6
L’oracle, consulté par les prêtres des dieux, 12
5 Dit : « Il faut ce que Rome a de plus précieux, » 12
Et Rome croit l’oracle ! 6
Le gouffre ouvert mugit comme un sombre océan, 12
Rugit comme un lion et comme un ouragan. 12
Bouche du noir abîme, 6
10 La nuit en sort, mêlée à de rouges lueurs, 12
Oh ! c’est beau, s’il ne faut pour de telles horreurs 12
Qu’une seule victime ! 6
Citoyens, ce que Rome a de plus précieux, 12
C’est ce jeune homme ayant dans l’éclat de ses yeux 12
15 Tout le ciel d’Italie ; 6
Dans le cœur, tout l’amour des austères Brutus 12
Pour la grande patrie. Approche, Curtius ! 12
Ta vie est accomplie. 6
Pourquoi pâlir, Romains ! Il est doux de mourir 12
20 En sauvant son pays ; il fait bon s’endormir 12
Sous le cyprès civique. 6
Et sur son cheval blanc, hennissant de terreur, 12
Curtius, frémissant, s’écrie avec ardeur : 12
« Vive la République ! » 6
25 Ils tombèrent tous deux : le cheval effrayant 12
De terreur et couvert d’une écume de sang ; 12
Le maître magnifique ! 6
L’abîme se ferma ; mais sous terre on entend 12
La voix de Curtius, dans la nuit, répétant : 12
30 « Vive la République ! » 6
Rome encore parfois s’éveille à cet accent 12
Et se lève soudain, tant il est menaçant, 12
Le crieur fatidique. 6
Mais elle se rendort dans un songe accablant… 12
35 Hélas ! ô Curtius, ta mort devait pourtant 12
Sauver la République !… 6
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