Métrique en Ligne
MER_1/MER5
Stuart MERRILL
Petits Poèmes d'Automne
1895
AMOUR D'AUTOMNE
V
Au temps de la mort des marjolaines, 9
Alors que bourdonne ton léger 9
Rouet, tu me fais, les soirs, songer 9
A tes aïeules les châtelaines. 9
5 Tes doigts sont fluets comme les leurs 9
Qui dévidaient les fuseaux fragiles. 9
Que files-tu, sœur, en ces vigiles, 9
Où tu chantes d’heurs et de malheurs ? 9
Seraient-ce des linceuls pour tes rêves 9
10 D’amour, morts en la saison des pleurs 9
D’avoir vu mourir toutes les fleurs 9
Qui parfumèrent les heures brèves ? 9
Oh ! le geste fatal de les mains 9
Pâles, quand je parle de ces choses, 9
15 De tes mains qui bénirent les roses 9
En nos jours d’amour sans lendemains ! 9
C’est le vent d’automne dans l’allée, 9
Sœur, écoute, et la chute sur l’eau 9
Des feuilles du saule et du bouleau, 9
20 Et c’est le givre dans la vallée. 9
Dénoue — il est l'heure — tes cheveux 9
Plus blonds que le chanvre que tu files ; 9
L’ombre où se tendent nos mains débiles 9
Et propice au murmure des vœux. 9
25 Et viens, pareille à ces châtelaines 9
Dolentes à qui tu fais songer, 9
Dans le silence où meurt ton léger 9
Rouet, ô ma sœur des marjolaines ! 9
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