Métrique en Ligne
LOZ_2/LOZ186
Albert LOZEAU
Poésies complètes II
LE MIROIR DES JOURS
1907-1912
1912
LE MIROIR DES JOURS
(1907-1912)
II
LE CŒUR ET LES LÈVRES
LE PLUS GRAND MAL
Lorsque je vous aimais, j’avais le cœur en peine, 12
Car je ne savais pas si vous reviendriez. 12
Je souffrais ; ma souffrance alors n’était point vaine, 12
Et j’étais consolé dès que vous paraissiez. 12
5 J’avais de longs chagrins et des doutes sincères. 12
Je croyais en vos yeux, puis je n’y croyais plus, 12
Et, fou, je m’inventais d’innombrables misères : 12
Je vivais indécis, tremblant, irrésolu. 12
Je ne me décidais à rien qui me fût tendre, 12
10 Et je craignais d’oser ce que vous désiriez ; 12
Timide, j’avais l’air de ne jamais comprendre 12
Les invitations d’amour que vous faisiez. 12
Oui, je vivais contraint, quand vous me vouliez libre ! 12
Je ne sais quoi de fort toujours me retenait. 12
15 Confus, je me sentais lié par chaque fibre, 12
Comme si mon désir lui-même s’enchaînait ! 12
Je pleurais. J’éprouvais des angoisses profondes. 12
J’avais peur de vous perdre, ah ! peur affreusement ! 12
Par vous, je haïssais ou j’adorais le monde : 12
20 Pour un mot dédaigneux, un sourire clément ! 12
J’étais plein de remords suscités par ma faute, 12
Mais, enfin, je vivais, heureux ou malheureux ! 12
Dans mon bonheur furtif j’allais la tête haute : 12
Ce n’était qu’un instant, mais j’avais vu les cieux ! 12
25 Aujourd’hui, je ne suis pas même misérable ! 12
Du moins, quand je souffrais je me sentais un cœur ! 12
L’indifférence a fait mon âme inaltérable, 12
Et c’est un mal plus grand que toutes les douleurs ! 12
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